Dans une récente déclaration à Genève, le représentant permanent de l'Algérie auprès de l'ONU, Rachid Bladehane, a réaffirmé l'engagement « ferme » du pays en faveur des droits de l'homme. Cependant, un examen plus approfondi de la situation sur le terrain révèle un contraste saisissant entre la rhétorique officielle et la réalité vécue par de nombreux Algériens.
Bladehane a vanté la coopération de l'Algérie avec les mécanismes des Nations Unies et a souligné l'importance de la contribution de la société civile. Il a notamment mis en avant la création de l'Observatoire national de la société civile comme preuve de l'engagement du gouvernement envers un « dialogue ouvert et inclusif ». Pourtant, ces affirmations semblent en décalage avec les actions concrètes des autorités algériennes.
Depuis 2021, on constate une répression accrue de l'espace civique et une restriction des libertés fondamentales. Les manifestations, autrefois tolérées, sont désormais soumises à une procédure de notification préalable, ce qui entrave de facto le droit de réunion pacifique. Cette mesure, présentée comme nécessaire au maintien de l'ordre public, apparaît plutôt comme un outil de contrôle et de dissuasion.
En parallèle, les autorités algériennes ont multiplié les interdictions de sortie du territoire, limitant ainsi la liberté de mouvement de nombreux militants et personnalités critiques du régime. Cette pratique, qui s'apparente à une forme de sanction extrajudiciaire, soulève de sérieuses questions quant au respect de l'État de droit et des libertés individuelles.
Plus alarmant encore, des militants de la diaspora font l'objet d'arrestations à leur retour au pays. Des cas comme celui de Mohand Taferka ou de l'artiste Djamila Bentouis, emprisonnés pour « apologie du terrorisme », illustrent une tendance inquiétante à criminaliser l'engagement politique et l'expression artistique. Ces accusations, souvent vagues et mal définies, semblent être utilisées comme un outil pour museler toute forme de dissidence, y compris celle exprimée à l'étranger.
Le représentant algérien a affirmé que « la liberté d'association est pleinement exercée en conformité avec la loi et les standards internationaux ». Or, les faits dressent un tableau bien différent. La dissolution forcée d'associations et de partis politiques témoigne d'une restriction sévère de cette liberté. L'association RAJ (Rassemblement Action Jeunesse), connue pour son engagement en faveur des droits humains et de la démocratie, a été dissoute par décision de justice en 2021, malgré son rôle crucial dans la société civile algérienne. De même, plusieurs partis politiques, dont le PST (Parti socialiste des travailleurs), ont été interdits, limitant ainsi le pluralisme politique. Sans oublier la ligue algériennes de défense des droits de l’homme, dissoute en septembre 2022.
Ces actions, conjuguées aux arrestations arbitraires de militants, journalistes et défenseurs des droits humains, illustrent de manière flagrante la disparité entre le discours officiel et la réalité du terrain. Le cas d'Ihsane El Kadi, journaliste indépendant condamné à sept ans de prison pour son travail, n'est qu'un exemple parmi d'autres de cette répression systématique.
En conclusion, le fossé entre les déclarations diplomatiques de l'Algérie et la situation réelle des droits de l'homme dans le pays est préoccupant. Alors que le gouvernement algérien cherche à projeter une image de respect des libertés et d'ouverture au dialogue, la réalité sur le terrain témoigne d'un rétrécissement inquiétant de l'espace démocratique.
Sophie K.
Comments