L’Algérie lance des mandats d’arrêts contre Kamel Daoud
- cfda47
- 6 mai
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L'écrivain et journaliste franco-algérien, Kamel Daoud, connu pour ses romans et ses chroniques engagées, est visé par des mandats d’arrêts internationaux lancés par l’Algérie, a rapporté le magazine le Point qui cite ses avocats.
L'écrivain franco-algérien, fait face à des poursuites judiciaires en Algérie, notamment deux mandats d'arrêt internationaux émis contre lui en raison de son dernier roman. Son œuvre et ses prises de position ont suscité des débats et des controverses, notamment autour de la liberté d'expression et des tensions politiques.
Ces mandats ont été délivrés par un juge du tribunal d'Oran, la ville où il a vécu avant de s'installer en France. Le premier a été émis en mars dernier, et le second lui a été notifié début mai. Ces poursuites judiciaires sont liées à son roman Houris, qui lui a valu le prix Goncourt en 2024.
Ce livre, interdit en Algérie, aborde des thèmes sensibles liés à la décennie noire (1992-2002), une période de guerre civile en Algérie. L'une des plaintes déposées contre lui concerne une violation de la loi sur la réconciliation nationale, une loi adoptée en Septembre 2005 qui interdit d'utiliser ou d'instrumentaliser les blessures de cette tragédie nationale.
Une autre plainte, déposée en novembre 2024, l'accuse d'atteinte à la vie privée, une femme affirmant qu'il s'est inspiré de son histoire personnelle sans son consentement. A Oran, une rescapée de la décennie noire, Saada Arbane, affirme que Kamel Daoud s’est emparé de son histoire pour écrire son roman. Elle a expliqué notamment que des éléments biographiques, auquel le chroniqueur du Point a eu accès grâce à sa femme psychiatre qui soignait la plaignante, se retrouvent dans Houris sans son aval. Bien au contraire.
Elle a donc déposé plainte pour « divulgation de secret médical » et « usurpation d’identité ». En même temps, l’association nationale des victimes de terrorisme a déposé plainte pour « violation de la loi sur la Paix et la réconciliation nationale » puisque l’écrivain aborde la période de la guerre civile dans son roman, ce qu’une disposition de la loi votée en 2005 interdit.
En France, Saada Arbane a déposé deux autres plaintes, l’une portant sur la « violation du secret médical » contre l’épouse de Kamel Daoud et une seconde pour « plagiat », étant donné qu’elle reproche à ce dernier d’avoir carrément raconté son histoire.
L’écrivain, lui, met en avant « l’inspiration » puisque l’histoire de la jeune femme est « celle de beaucoup d’autres femmes algériennes » qui ont vécu la décennie 1990. « Pendant la guerre civile des années 1990, on assassinait des écrivains, commente Kamel Daoud au Point. Aujourd'hui, on les met en prison et on lance des mandats d'arrêt contre eux. »
L'avocate de l'auteur, Me Jacqueline Laffont, estime que ces mandats ont été émis pour des considérations politiques. Elle prévoit de contester ces décisions auprès des instances concernées.
Cette affaire soulève des questions sur la liberté d'expression et la place de la littérature dans les débats politiques. Son œuvre la plus célèbre, Meursault, contre-enquête, a remporté le prix Goncourt du premier roman en 2015.
Le roman Houris de Kamel Daoud, lauréat du Prix Goncourt 2024, plonge dans la période sombre des années 90, à travers l'histoire d'Aube, une jeune femme rescapée d'un massacre islamiste. Égorgée à l'âge de cinq ans, elle survit mais reste muette, portant une cicatrice en forme de sourire tragique sur la gorge. Dans un monologue intérieur adressé à l'enfant qu'elle attend, elle interroge le silence qui entoure cette guerre civile et la violence faite aux femmes en Algérie.
Ce roman a suscité de vives réactions en Algérie, où il est interdit. Il a également conduit à des poursuites judiciaires contre Kamel Daoud, notamment pour violation de la loi sur la réconciliation nationale et atteinte à la vie privée, une femme affirmant que l'auteur s'est inspiré de son histoire sans son consentement.
E. Wakli
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