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la France rapatrie 35 enfants et 16 mères détenus dans des camps en Syrie


Image: France Info


Terrorisme : Hier, mardi 5 juillet, la France a procédé au rapatriement de 35 enfants et de 16 femmes retenus dans des camps pour prisonniers djihadistes du nord de la Syrie. L'opération s'est tenue en toute discrétion dans un camp de déplacés du nord-est de la Syrie.


Ce rapatriement de mères est une première:


Jusqu'ici, la France rapatriait les enfants au compte-goutte et au cas par cas. Une doctrine qui ne faisait pas l'unanimité. Les 35 enfants rapatriés s'ajoutent à 126 autres déjà transférés vers la France depuis 2016. Il resterait à ce jour plus de 160 mineurs et une soixantaine de mères dans les camps syriens.


Le coordinateur du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, Laurent Nunez, s'est exprimé sur RMC mercredi, au lendemain du rapatriement de 35 mineurs et 16 mères.


"Il reste une centaine de femmes et près de 250 enfants français dans des camps de prisonniers Jihadistes en Syrie après l'opération de rapatriement effectuée par la France mardi", a t-il affirmé.


Avant le rapatriement "dans la nuit de lundi à mardi" de 35 mineurs et 16 mères, il y avait "120 femmes et près de 290 enfants" français détenus dans les camps du nord-est syrien contrôlés par les Kurdes, a détaillé Laurent Nunez.


Il a expliqué que le critère "sécuritaire" serait de "plus en plus" considéré pour décider d'éventuelles futures opérations similaires, alors que les ONG et les familles souhaitent le rapatriement de tous et la fin de la politique du "cas par cas".


"Il y a des menaces peut-être d'opérations turques, l'EI (groupe Etat islamique) qui se reconstitue dans le désert syrien et projette d'aller libérer ces femmes et enfants", a poursuivi le coordinateur du renseignement et de la lutte contre le terrorisme. "Pour la sécurité de nos concitoyens, peut-être qu'il est mieux d'avoir (ces femmes et enfants) sous contrôle que de les voir dans une zone où elles peuvent s'égailler dans la nature."


La procédure qui encadre le retour de ces ressortissants qui vivaient jusqu'ici dans des camps de prisonniers Jihadistes est désormais rodée et commence dès la descente de l'avion.


Les femmes ont été remises aux autorités judiciaires et les enfants aux services d'aide à l'enfance, affirme le Quai d'Orsay. Cela signifie que la première étape, pour les douze femmes revenues accompagnées de leurs enfants, c'est la séparation.


Tout commence à la sortie de l'avion:


Les femmes de jihadistes sont immédiatement placées en garde à vue au sein des locaux de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).


A l'issue de l'interrogatoire, qui peut être prolongé jusqu'à six jours, elles sont présentées à un juge d'instruction. La plupart d'entre elles sont ensuite mises en examen pour "association de malfaiteurs terroriste" et placées en détention provisoire. "Cela laisse le temps pour des investigations et pour faire la lumière sur leurs agissements", précise Vincent Brengarth, qui représente trois familles d'enfants rapatriés mardi. "La prise en charge de ces mères exige des efforts de la justice mais elles sont identifiées au préalable", poursuit l'avocat.


Ainsi, parmi les 16 femmes revenues en France mardi, huit ont été placées en garde à vue "en exécution d'un mandat de recherche" et "huit font l'objet d'un mandat d'arrêt", précise le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.


Emilie König, la plus connue des Jihadistes françaises, fait partie de ces dernières. De ce fait, elles doivent être présentées à un juge d'instruction dans les 24 heures qui suivent leur arrivée sur le sol français. Et leur mise en examen est inéluctable.


Emilie König a ainsi été mise en examen et placée en détention provisoire le soir-même de son retour en France.


Cette femme de 37 ans, originaire de Lorient (Morbihan), a rejoint la zone irako-syrienne en 2012. Elle est mère de cinq enfants, dont trois nés en Syrie, rapatriés en France début 2021. Elle est accusée d'avoir recruté pour le groupe Etat islamique et appelé à commettre des attaques en Occident.


Les enfants, de leur côté, sont directement pris en charge par les services de l'Etat compétents:


Soit en Seine-Saint-Denis, s'ils ont atterri à l'aéroport de Roissy, soit dans les Yvelines, si l'avion s'est posé à Villacoublay. Dans ce type de dossier, le ou la juge des enfants prononce une ordonnance de placement provisoire (OPP) dès leur descente de l'avion et les mineurs sont aussitôt pris en charge par les services de l'Aide sociale à l'enfance.


Pendant ce temps, les enfants doivent "s'habituer à une autre façon de vivre", estime la juge des enfants, en charge d'un dossier avec quatre enfants rapatriés en France depuis plus d'un an.


Leur mère vient de rentrer de zone irako-syrienne. Des visites avec ses enfants vont pouvoir être organisées, y compris si elle est en détention.


Le lien avec la famille en France, bien souvent des grands-parents, se noue ou se renoue de façon progressive. "La famille doit être parfaitement équilibrée", souligne Marc Bailly, qui estime qu'il s'est écoulé un an et demi "entre le moment où les enfants ont atterri" et celui où ses clients ont pu obtenir la garde de leurs petits-enfants.


Des enfants sont parfois placés dans une famille d'accueil:


"Parfois c'est une famille relais. Les fratries peuvent être séparées. On fait comme on peut, en fonction des disponibilités", précise une magistrate au micro de France Info.


D'après le Parquet national antiterroriste, un seul mineur de 17 ans, qui deviendra "majeur dans les jours qui viennent", a été placé en garde à vue, car "il existe des éléments susceptibles de caractériser sa participation à une association de malfaiteurs terroriste".


Pour tous les autres, un long parcours commence. "Bilan tant somatique que médico-psychologique", "suivi psychothérapeutique", "scolarisation", "accompagnement"... La prise en charge des enfants de retour de Syrie est lourde, compte-tenu du traumatisme qui peut être le leur. Elle repose sur des circulaires du ministère de la Justice de 2018 et 2020.



Lila MOKRI,

Paris, 06 Juillet 2022

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