Le projet de loi des finances 2024 a suscité beaucoup de curiosité et d’espoir ces derniers mois. Il promettait notamment de revaloriser les salaires des fonctionnaires, de soutenir le pouvoir d’achat, de lancer le programme des 300 000 logements à construire et de stimuler les autres investissements à venir.
Cette loi a été publiée le premier janvier 2024 et nous allons vous en présenter les principales dispositions.
Le budget de recettes prévisionnelles de l’Algérie pour l’année 2024 est estimé à 9 105 milliards de dinars (environ 68 milliards de dollars US) 1. Les revenus de la fiscalité ordinaire représentent 45 % du budget, soit 4 117 milliards de dinars. Les revenus de la fiscalité pétrolière représentent 39 % du budget, soit 3 512 milliards de dinars. Les revenus de l’État représentent 16 % du budget, soit 1 476 milliards de dinars .
Il est intéressant de noter que les revenus de l’Algérie ne proviennent pas principalement de la fiscalité pétrolière, mais plutôt des impositions fiscales et parafiscales sur les entreprises et les citoyens, qui représentent 55 % des revenus de la fiscalité ordinaire . L’impôt sur le revenu global « IRG » est la principale source de revenus de la fiscalité ordinaire, représentant 45 % des revenus de cette catégorie, soit 1 862 milliards de dinars.
Cet impôt est subdivisé en deux catégories : l’IRG supporté par les commerçants et l’IRG supporté par les travailleurs en impôt sur les traitements et salaires, qui est majoritaire car il est prélevé directement à la source sur fiche de paie .
L’impôt sur la consommation « TVA et autres taxes indirectes » est également une part importante des revenus de la fiscalité ordinaire, représentant 39 % de ces revenus, soit 1 622 milliards de dinars .
L’impôt sur le capital en Algérie est estimé à 63 milliards de dinars, ce qui représente seulement 1,5 % du revenu total . Cette proportion révèle que l’économie algérienne repose principalement sur les travailleurs et les citoyens, qui supportent la majorité des impositions fiscales et parafiscales sur la consommation.
Cette situation grève sensiblement le pouvoir d’achat des algériens .
Le montant des dépenses prévisionnelles par secteurs est de quinze mille deux cents quatre-vingt-treize milliards de dinars 15 293 Milliards de da répartis entre les gros secteurs comme suit :
1/ Finances = 3 172 Milliards de da soit 21 %
2/ Défense nationale = 2 926 Milliards de da soit 19 %
3/ Education nationale = 1 490 Milliards de da soit 10 %
4/Intérieur = 1 320 Milliards de da soit 9 %
5/Habitat et urbanisme = 1 104 Milliards de da soit 7 %
6/Travail = 864 Milliards de da soit 6 %
7/ Santé = 846 Milliards de da soit 6 %
8/Agriculture = 661 Milliards de da soit 4 %
9/Enseignement supérieur = 619 Milliards de da soit 4 %
10/Travaux publics = 465 Milliards de da soit 3 %
Autres « Institutions publiques » = 1 823 Milliards de da soit 12 %
D’après la ventilation par secteurs, le premier poste budgétaire est celui des finances, représentant 21% du budget global.
Cependant, en dehors des dépenses classiques des salaires et autres dépenses du ministère des finances, il contient deux rubriques inconnues et inexpliquées que seuls la présidence et le ministre des finances peuvent connaître. Ces deux rubriques sont :
• Trésor et gestion comptable pour un montant de 889 milliards de dinars.
• Crédits non assignés pour un montant de 1 920 milliards de dinars.
Il est surprenant que les élus du peuple, tels que les députés et les sénateurs, aient voté la loi de finances sans avoir connaissance des détails de ces rubriques. En conséquence, la présidence et le ministère des finances disposent d’un budget énorme dont ils peuvent disposer à leur guise sans contrôle parlementaire ?
En outre, il est important de souligner que de nombreux articles de la loi de finances 2024 se terminent par des post-scriptum tels que « Les conditions et modalités d’application du présent article sont précisées par voie réglementaire » ou « Les modalités d’application du présent article sont définies, en tant que de besoin, par voie réglementaire ».
Ces notes ont pour effet de limiter ou d’entraver l’application de la loi, car elles ne fournissent pas suffisamment de clarté sur les modalités d’application. Il est donc nécessaire de clarifier ces dispositions pour garantir une application efficace de la loi.
Aussi, le texte nous révèle une surprise de taille : le fonds des avoirs et biens confisqués ou récupérés dans le cadre des affaires de lutte contre la corruption ne contient que 21 424 781 956 da soit 159 millions de dollars. C’est bien loin des 30 milliards de dollars proclamés récemment avec fanfare !
Ce sont les chiffres macro-économiques de la loi des finances 2024 qui sont à souligner quant aux principaux détails, nous en citerons quelques-uns :
Mesures en faveur de la solidarité nationale
La partie relative à l’entraide nationale prévoit la mise en place d’une taxe locale de solidarité, d’une contribution de solidarité, fonds de pension alimentaire et d’une allocation forfaitaire de solidarité.
- La taxe locale de solidarité est imposée sur les activités minières et de transport par canalisation des hydrocarbures. Elle est fixée à 3% et 1,5% du chiffre d’affaires de ces deux domaines respectivement. La taxe est répartie comme suit : 66% au profit de la commune où se situe le site minier, pour les activités minières, et au profit des communes traversées par les canalisations de transport des hydrocarbures ; 29% au profit de la wilaya où se situe le site minier, pour les activités minières, et au profit des wilayas traversées par les canalisations de transport des hydrocarbures ; et 5% au profit de la caisse de solidarité et de garantie des collectivités locales.
- Il est institué une contribution de solidarité au taux de 2% applicable aux opérations d’importation de marchandises mises à la consommation en Algérie.
Le taux de cette contribution est fixé à 5% au titre des opérations d’importation des matières premières et des intrants servant à la fabrication des produits tabagiques.
- Il est créé un fonds de pension alimentaire géré par le ministère de la justice et destiné à couvrir la pension alimentaire des femmes divorcées dont les maris sont récalcitrants à verser leurs dus.
- Il est institué une allocation forfaitaire de solidarité allouée aux catégories sociales sans revenus. Les catégories des bénéficiaires et les conditions et modalités du bénéfice de cette allocation sont fixées par voie réglementaire.
Logements
- Le budget 2024 prévoit pour le logement un montant de 711 794 774 000 da soit 5 273 milliards de dollars et ce, en prévision du programme annoncé des 300 000 logements promis par le gouvernement avec une batterie d’autres mesures.
Pouvoir d’achats
Sont exemptés de la TVA :
1- Les opérations d’importation et de vente des produits, localement produits destinés à la consommation humaine :
2- Les opérations de vente portant sur les fruits, les légumes frais, les œufs de consommation, le poulet de chair et la dinde, produits localement.
3- Les revenus issus de la vente du lait crus sont exonérés de l’IRG et l’IBS et de l’IFU à titre permanent et les revenus issus des activités d’investissements bénéficient d’une exonération temporaire.
4- Sont exemptés de la taxe sur la valeur ajoutée :
5- 1) Les opérations de vente portant sur : — les céréales destinées à la fabrication des farines citées ci-dessous et des semoules ; — les farines courantes et supérieures ; — les semoules ; — le pain.
Enfin, une bonne nouvelle pour les familles : Les donations entre vifs consentis entre ascendants et descendants du premier degré et entre époux, sont exonérées des droits d’enregistrement.
Mais attention !
Les commerçants de gros et les producteurs doivent fournir chaque année à l’administration fiscale un état des clients dûment renseigné. Bien que cette obligation ait toujours existé, de nombreuses mesures coercitives ont été édictées cette fois-ci, telles que l’obligation faite à l’opérateur économique de vérifier lui-même les informations avec le fichier électronique du CNRC « Centre national du registre de commerce ».
Tout contrevenant sera exposé à des amendes importantes, sans compter les poursuites pénales de la part des directions de commerce. Avec ce tour de vis, il est difficile pour les commerçants d’échapper à l’imposition fiscale.
Yacine M
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