Un colloque « Paix et réconciliation » est organisé à Périgueux, pour parler des sujets chauds liés à l’Algérie, de Bugeaud aux harkis:
« Il faut libérer la parole, faire entendre les différentes mémoires, montrer le chemin parcouru depuis 1962 », résume Rodolphe Delcros, l’adjoint au maire de Périgueux chargé de la culture.
L’idée lancée par Hugues Robert, le fils de l’ancien préfet Jean-Marie Robert, organisateur d’une filière d’exfiltration de harkis vers la Dordogne, a abouti à la mise en place du premier colloque « Paix et réconciliation » organisé à Périgueux du 23 au 25 septembre prochain.
En cette année du soixantième anniversaire des accords d’Évian, cette organisation a fédéré le Conseil départemental, l’Office national des anciens combattants et le monde associatif, dont les harkis de Dordogne et leur président Hamid Khemache.
Après l’ouverture, vendredi 23 septembre, destinée aux scolaires et la projection à 20 h 30 du film « Les Harkis » au cinéma CGR , une longue journée de débats s’annonce samedi 24 septembre au Théâtre.
Dès 9 h 30, de nombreuses interventions en présence d’historiens et de témoins aborderont des sujets chauds liant l’Algérie à la Dordogne : la conquête sanglante par le maréchal Bugeaud (de 1836 à 1847), qui a deux statues en Périgord ; mais aussi le rôle du Périgordin Robert Lacoste, qui fut gouverneur de l’Algérie.
Enfin, on parlera du sous-préfet de Sarlat Jean-Marie Robert nommé après un poste en Kabylie, qui organisa une filière de sauvetage de harkis de 1962 à 1976 vers la Dordogne.
Dimanche 25 septembre, ce sera la cérémonie officielle d’hommage aux harkis sur les allées de Tourny, avant un couscous de la fraternité au Lux.
Hugues Robert insiste sur la terrible question des camps : d’abord des camps de regroupement de civils en Algérie pour éviter l’aide au mouvement de libération, puis des camps d’internement des combattants où des exactions ont été commises. En France, il y eut ensuite les camps qui regroupaient les harkis dans de piètres conditions.
Jacques Ranoux, qui représente le Département, souligne les séquelles de la colonisation puis de la guerre d’Algérie, et surtout « les difficultés d’en parler encore aujourd’hui de manière apaisée ». « Ce colloque était nécessaire. » conclut-il.
Périgueux est une commune française, la plus peuplée du Périgord, du sud-ouest de la France en région Nouvelle-Aquitaine.
Le maréchal Bugeaud (1784-1849) accéléra et étendit la conquête de l'Algérie par la France entre 1836 et 1847:
Il couvrit là-bas des exactions, mais en Dordogne il a laissé une bonne image, en raison notamment de son rôle dans la modernisation de l'agriculture.
A Périgueux, sa statue trône depuis 1853, au centre de la place qui porte son nom. Il y a quelques mois des jeunes avaient noué une corde à son cou, à la lumière des violences qui lui sont reprochées lors de la conquête d'Algérie. A tel point qu'aujourd'hui, certaines personnes sont gênées quand on leur demande de s'exprimer sur ce personnage historique.
En 2022, alors que la France poursuit collectivement un travail critique sur son passé colonial, des hommes comme le maréchal Bugeaud, qui ont conquis sabre au poing des territoires en Afrique ou en Asie, passeraient presque pour des criminels.
Les français avaient déjà un pied en Afrique du Nord quand le maréchal Bugeaud y fut envoyé une première fois en 1836. Il était au début lui-même personnellement opposé à la conquête de ce territoire.
Progressivement, il change d’avis et se fait le chantre d’une colonisation résolue de l’Algérie sous la conduite de l’armée.
Devenu gouverneur général de l’Algérie en 1840, il demande des moyens importants et obtient 100 000 hommes. Il multiplia alors les raids militaires pour obtenir la soumission des tribus algériennes fédérées notamment autour du chef l'Emir Abd-El-Kader.
L’armée française brûla ainsi des villages, des récoltes et vola des chevaux, rien de très glorieux. Avec très peu de place pour la pitié.
On prête ainsi une phrase terrible à Bugeaud :
"Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbéhas ! Fumez-les à outrance comme des renards."
Il fait alors référence aux fameuses enfumades qui ont consisté à mettre le feu devant des grottes où les Algériens avaient trouvé refuge, et de les tuer ainsi, asphyxiés.
Anais Thibault
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