La soirée d’hier, 8 septembre 2024 sera gravée à jamais dans les annales de l’Histoire de l’Algérie… enfin, dans celles des amateurs de suspense électoral.
Les Algériens, accrochés à leurs téléviseurs et les doigts rivés sur leurs écrans de smartphones, ont passé la journée à guetter les résultats des élections présidentielles de la veille.
Tandis que les citoyens avaient déjà un avis tranché sur la réélection du président sortant, Abdelmadjid Tebboune, sans grande surprise, leur curiosité était piquée par un détail croustillant : le taux de participation.
En effet, ce taux a bondi de 23 % à 48 % entre 17 heures et 20 heures, un écart qui aurait pu faire rougir les levures les plus audacieuses !
Ce phénomène, digne des plus grands mystères statistiques, a suscité une avalanche de commentaires humoristiques sur les réseaux sociaux.
Les Algériens ont comparé cette augmentation éclair à une opération de levain, suggérant que la participation électorale avait fermenté comme une pâte à pain, attendant patiemment le résultat final.
Dans le monde de la presse, c'était un peu le festival du "qui va arriver en premier ?"
Les journalistes, tels des gardiens de but impatients, se sont tenus en faction devant le siège de l'Autorité Nationale Indépendante des Élections (ANIE), attendant avec fébrilité les chiffres promis.
Finalement, c'est vers 17 heures que M. Mohamed Charfi, président de l’ANIE, est arrivé avec la délicatesse d’un grand chef dévoilant son chef-d'œuvre, distillant les résultats avec parcimonie et une touche de suspense.
Alors que les médias internationaux et nationaux, faisaient le pied de grue, les Algériens, eux, se demandaient si le taux de participation était le produit d'une poussée authentique ou simplement un tour de magie électorale.
Lors de sa très officielle annonce des résultats des élections présidentielles, M. Charfi a d'abord commis une erreur de calcul monumentale : les taux des candidats totalisent non pas 100 %, mais seulement 99.98 %, égarant ainsi 0.02 % en chemin.
Ce cafouillage a laissé les observateurs et les électeurs perplexes, se demandant où avait bien pu se volatiliser ce précieux pourcentage.
Mais le suspense ne s’est pas arrêté là.
En conclusion, M. Charfi, pressé de clore sa conférence de presse, a bâclé sa présentation, omettant de révéler le taux de participation nationale.
Le mystère reste donc entier, laissant les Algériens avec plus de questions que de réponses et une bonne dose d’incompréhension pour pimenter leur soirée.
Et c’est précisément cette méprise qui a semé la stupéfaction, l’étonnement, et l’incompréhension parmi les Algériens : comment pouvait-on oublier un chiffre aussi crucial que le taux de participation nationale en un moment aussi décisif des élections ?
Mais le plus surprenant aussi, c’est que tard dans la soirée d’hier, les trois candidats à l’élection présidentielle ont publié un communiqué en commun dénonçant les imprécisions, les contradictions, les ambiguïtés et les incohérences dans la déclaration du président de l’autorité nationale.
Les trois directions de campagne ont aussi relevé "l'ambiguïté du communiqué qui ne comportait pas la plupart des données essentielles des communiqués d’annonce des résultats, comme il est d'usage dans toutes les échéances nationales importantes", faisant également état d'"une incohérence dans les taux annoncés pour chaque candidat.
Il est compréhensible que Hassani Cherif Abdelaali et Aouchiche Youcef, manifestement lésés par l’ANIE, publient un communiqué de dénonciation.
Cependant, il est presque surréaliste de voir le président de la République, bénéficiaire de ces erreurs, se joindre à l’opposition pour critiquer sa propre autorité !
Hier soir, les Algériens n’étaient pas à leur première surprise.
En effet, vers minuit, M. Charfi Mohamed a diffusé un communiqué tardif, précisant que le comptage des voix était toujours en cours, en attendant la réception des procès-verbaux des wilayas.
Il a assuré que, une fois l’opération terminée, il transmettrait les chiffres à la Cour constitutionnelle ainsi qu’à l’opinion publique.
Ce soir, au journal télévisé de vingt heures, la télévision nationale a, pour la première fois, donné la parole aux candidats lésés, mentionnant les erreurs survenues lors de la déclaration des résultats des élections présidentielles.
De plus, la chaîne a même accordé une tribune au représentant du RND pour affirmer que l’Algérie dispose d’institutions crédibles, citant comme preuve la signature du communiqué de protestation par le président de la République.
Pourtant, la télévision nationale n'a pas incriminé Mohamed Charfi ; elle a plutôt renvoyé la responsabilité au conseil constitutionnel.
En conséquence, les Algériens ne connaîtront pas le taux officiel de participation, qui est de 23 %, ni le taux d’abstention, qui s’élève à 77 %.
Yacine M
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