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Sénégal: la répression des manifestations fait trois morts, Amnesty International exige des comptes

La stabilité politique du Sénégal, îlot démocratique en Afrique de l'Ouest, se lézarde. Depuis bientôt trois ans, le projet présumé du président Macky Sall de briguer un troisième mandat ultime crispe l'opposition et une partie croissante de la population, qui descend régulièrement dans la rue pour le dénoncer. En face, la réponse sécuritaire se durcit de jour en jour.


Dans un rapport accablant publié le 13 février, l'ONG Amnesty International tire la sonnette d'alarme après un week-end sanglant. Au moins trois civils ont été tués par les forces de l'ordre lors de la dispersion de rassemblements pacifiques les 9 et 10 février dans différentes villes du pays.


Parmi les victimes, Alpha Yoro Tounkara, étudiant prometteur de 22 ans. Le 9 février, avec d'autres camarades, il manifeste depuis le campus de l'université Gaston Berger de Saint-Louis lorsque la situation dégénère subitement. “Nous avons décidé de descendre dans la rue, mais rapidement, ils [les policiers] ont commencé à tirer des grenades lacrymogènes et des balles en caoutchouc pour nous disperser. Alpha a été touché sous l’aisselle et est tombé à terre. Nous l’avons conduit à l’hôpital, mais peu après, son décès a été prononcé” raconte, sous le choc, l'un de ses amis.


Le lendemain à Dakar, Modou Gueye, jeune vendeur ambulant de 23 ans, est mortellement touché au ventre par un tir policier alors qu'il tentait de rassembler sa marchandise éparpillée en marge d'une manifestation. Même sort tragique pour Landing Camara, adolescent de 16 ans visé à la tête par un projectile des forces de l'ordre dans la ville de Ziguinchor alors qu'il fuyait chez lui les gaz lacrymogènes.


Les autorités sénégalaises continuent de faire montre d’un mépris flagrant pour la dissidence pacifique. Elles doivent mener dans les meilleurs délais une enquête approfondie et transparente sur l’usage meurtrier de la force à l’encontre des manifestants”, tonne Samira Daoud, directrice régionale d'Amnesty International.


Car les bavures policières se multiplient, dans une escalade répressive inquiétante. Outre le bilan mortel, de nombreuses arrestations arbitraires sont signalées, ainsi que des violences caractérisées à l'encontre de journalistes qui tentent de documenter la colère populaire.


La directrice d'Amnesty en appelle ainsi à “la libération immédiate” de tous les prisonniers d'opinion, et exige que les responsables des homicides de civils “soient identifiés et traduits en justice”. À six mois de la présidentielle, la tension politique au Sénégal atteint son paroxysme. La retenue et la désescalade s'imposent urgemment des deux côtés pour éviter le chaos.


YACINE M.

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