Ce vendredi, 29 septembre, la cinémathèque d’Oran a renoué avec sa gloire passée le temps d’une soirée, en accueillant la projection-débat d’un film documentaire et historique. Le public nombreux, cinéphile et connaisseur, était au rendez-vous, attiré par la forte personnalité du sujet de l’œuvre, Pierre CHAULET, et par la maîtrise cinématographique du réalisateur, Saïd MEHADAOUI.
C’était en 1987, à Saida, la ville des amateurs de cinéma. Saïd MEHDAOUI, un jeune homme plein de talent, présentait son œuvre « Youm El Djamaa », un court-métrage en super 8, réalisé avec une simple pellicule. Quatorze minutes pour raconter la vie d’un garçon qui se lève un vendredi matin, hésite à se raser, sort dans la rue, retrouve ses amis du quartier et déambule dans la ville. Pas de dialogue, juste une voix off qui dit des vers en daridja, la langue du peuple. Un style épuré, des plans rapides, une atmosphère poétique.
Le film séduit le public et le jury du festival, qui lui décerne le premier prix. C’est le début d’une carrière de cinéaste amateur reconnu.
Saïd MEHDAOUI a découvert sa passion pour l’image au lycée, au quartier du Ruisseau. Il a commencé par la photographie, puis s’est initié à la caméra super 8, quand il est devenu étudiant à Boumerdes. Il a poursuivi ses études à l’école de Bousmail, où il a obtenu son diplôme d’ingénieur mécanicien dans la marine marchande. Mais son rêve était de faire du cinéma.
Il a participé à plusieurs festivals de films amateurs, remportant des prix et des éloges, mais aussi essuyant des échecs. Son film « Le Clap », réalisé en 1992, lui a valu le grand prix du festival d’Annaba. En 1994, il a franchi un nouveau cap en passant à la Betacam, un format plus professionnel. Son film muet « Ennouara » (Le tourbillon), tourné avec cette technique, a été couronné meilleur film semi-professionnel.
Suite à la décennie noire des années 90 qui a paralysé toute activité intellectuelle et laissé un vide culturel, il crée sa propre société de production « ID PROD » et se consacre au long métrage.
En 2009, il salut les précurseurs du cinéma algérien comme René VAUTIER et CHNADERLY par le film « Les cinéastes de la liberté » de 68 mn.
En 2014, il explore la Saoura à Timoum et réalise « Yenayer », un film qu’il brade à la télévision nationale. Entre ses films personnels qui l’animent, il travaille sur des commandes jusqu’à réaliser cette œuvre exceptionnelle qu’est ce documentaire sur Pierre CHAULET.
Après la projection, la salle fut saisie d’une grande émotion, tant les témoignages des intervenants dans le film étaient touchants. Le débat fut animé et parfois houleux, et les anciens, venus en nombre, retrouvèrent le plaisir d’échanger et de se retrouver. Ils restèrent longtemps après le film à discuter, à prendre des selfies et des photos de famille.
Même à l’extérieur, dans la rue, les spectateurs ne voulaient pas partir. La cinémathèque d’Oran n’avait pas connu une telle ambiance depuis longtemps. Et cela grâce à Saïd MEHDAOUI qui n’a pas cherché à s’accaparer la parole et qui a déclaré que le film appartenait désormais aux spectateurs.
Ainsi, le cinéma a réuni les âmes, et fait revivre les souvenirs et les flammes, de ceux qui ont aimé et lutté pour cette terre, et de ceux qui ont su leur rendre hommage en lumière.
Yacine M