Dans un climat politique tendu, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a jeté son chapeau dans l'arène électorale, annonçant sa candidature pour un second mandat. Cette décision, loin d'être une surprise, a néanmoins fait l'effet d'une onde de choc dans le paysage médiatique international, révélant des fractures profondes dans la perception de la démocratie algérienne.
« Une victoire annoncée ou un simulacre démocratique ?» C'est la question qui brûle les lèvres des observateurs internationaux. La presse francophone, à l'instar de RFI et Le Monde, ne mâche pas ses mots. Le politologue Hasni Abidi résume avec acidité : « Tebboune bénéficie d'un avantage considérable en l'absence d'alternatives crédibles et d'une véritable opposition ». Une façon à peine voilée de suggérer que le jeu démocratique serait faussé dès le départ.
Le Monde rappelle le contexte de la première élection de Tebboune en 2019, « marquée par une forte abstention », soulevant ainsi la question de la légitimité populaire. Jeune Afrique enfonce le clou, évoquant une « tradition du système algérien » où les présidents sortants jouent la montre, annonçant tardivement leur candidature pour « faire l'économie d'une campagne électorale longue ». Une stratégie qui soulève des questions sur l'équité du processus électoral.
Du côté de la presse arabophone, le ton change radicalement. Sky News Arabia va jusqu'à prédire une victoire quasi certaine de Tebboune, tandis qu'Al-Quds Al-Arabi rapporte, sans sourciller, les déclarations triomphantes du président sur une « Algérie respectée militairement, politiquement et sur tous les fronts, ses réussites étant reconnues par les adversaires avant les amis. »
El Hurra et Al Jazeera, tout en restant factuels, apportent un éclairage intéressant sur les coulisses de l'élection. Al Jazeera révèle notamment que pas moins de 34 candidats ont retiré les formulaires de candidature. Une information qui pourrait laisser croire à un véritable pluralisme politique, si ce n'était le scepticisme ambiant.
Cette dichotomie dans la couverture médiatique soulève une question cruciale : assistons-nous à une véritable consultation démocratique ou à une mise en scène électorale bien huilée ? La presse francophone n'hésite pas à mettre le doigt là où ça fait mal, citant un rapport d'Amnesty International qui dénonce la répression des libertés d'expression et de réunion. Un angle mort dans la couverture de la presse arabophone, qui semble plus préoccupée par les détails techniques de l'élection que par les enjeux démocratiques qu'elle soulève.
Au-delà des divergences d'analyse, tous s'accordent sur un point : cette élection est déterminante pour l'avenir de l'Algérie. Tebboune, qui aura 80 ans en novembre, incarne-t-il la stabilité nécessaire dans une région troublée ou représente-t-il un frein aux aspirations de changement d'une jeunesse impatiente ?
Entre les lignes des communiqués officiels et des analyses critiques se dessine le portrait d'une Algérie en quête d'elle-même, tiraillée entre le désir de préserver ses acquis et la nécessité de se réinventer face aux défis du XXIe siècle.
Alors que le compte à rebours est lancé pour le scrutin du 7 septembre, une chose est sûre : l'Algérie est à un tournant de son histoire. Reste à savoir si ce tournant sera pris à pleine vitesse ou au ralenti, sous le regard attentif d'une communauté internationale plus divisée que jamais sur l'interprétation de cette « démocratie à l'algérienne ».
Sophie K.