Une crise entre le Maroc et la Tunisie provoquée par la réception à Tunis de Brahim Ghali
- cfda47
- 5 sept. 2022
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La photo du président Tunisien Kaïs Saïed accueillant le président du Front Polisario à sa descente d’avion le 26 août 2022 a été beaucoup partagée sur les réseaux sociaux et commentée par les médias.
Les deux hommes se sont, par la suite entretenus dans le salon présidentiel de l’aéroport de Tunis, selon le même protocole que celui réservé aux chefs d’État et de gouvernement, venus assister à la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (en anglais Tokyo International Conference on African Development, Ticad) qui se tenait dans la capitale tunisienne.
Reproduites dans un premier temps sur la page Facebook de la présidence de la République tunisienne, avant d’en être retirées, ces images allaient provoquer la colère de Rabat et susciter interrogations et étonnement auprès des Tunisiens qui n’ignorent pas la sensibilité de ce dossier au Maroc.
Il faut surtout noter qu’il est aujourd’hui établi que ce sont le Premier ministre du Japon, Fumio Kishida, et le président tunisien, Kaïs Saïed, qui ont signé les invitations adressées aux participants du 8e forum africano-nippon (Ticad 8). Un document de la mission japonaise auprès de l’Union africaine, daté du 19 août 2022, vient confirmer que le Polisario n’a pas été invité à cette manifestation à Tunis, puisque le Japon ne le reconnaît pas, et a toujours refusé de l’inviter à ce qui est «son» forum.
Le sommet Japon-Afrique (Ticad) qui s'est terminé dimanche à Tunis, avait commencé par l'annulation du Maroc:
Des sources diplomatiques ont indiqué que le président de la Guinée Bissau et président en exercice de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), Umaro Sissoco Embalo, a quitté la 8ème Ticad pour protester contre la participation du "Polisario" imposée par la Tunisie.
Auparavant, dans son discours à l'ouverture du sommet, le Sénégalais Macky Sall, président en exercice de l'Union africaine, avait regretté l'absence du Maroc "faute de consensus sur une question de représentation", souhaitant la rapide résolution du problème.

Tunis et Rabat ont rappelé leurs ambassadeurs respectifs pour "consultations":
En annonçant le rappel de son ambassadeur, Tunis a assuré avoir "maintenu sa totale neutralité sur la question du Sahara occidental dans le respect de la légitimité internationale", prônant une "solution pacifique et acceptable par tous".
Rabat ne décolère pas contre Tunis. "L'accueil réservé par le chef de l'Etat tunisien au chef de la milice séparatiste est un acte grave et inédit, qui heurte profondément les sentiments du peuple marocain et de ses forces vives", déclare le ministère marocain des Affaires étrangères qui parle "d'attitude hostile". Tout en précisant que "cette décision n'affecte en rien les liens forts et intacts entre les peuples marocain et tunisien, qui sont liés par une histoire commune et un destin partagé".
De son côté Tunis, en annonçant le rappel de son ambassadeur, assure avoir "maintenu sa totale neutralité sur la question du Sahara occidental dans le respect de la légitimité internationale", prônant une "solution pacifique et acceptable par tous". Sans convaincre Rabat.
Rabat a jugé la réponse de Tunis truffée "de nombreuses approximations et contrevérités" qui approfondissent "les ambiguïtés qui entourent la position tunisienne", dans un nouveau communiqué du ministère des Affaires étrangères marocain.
Le Maroc s'est notamment offusqué d'affirmations de la diplomatie tunisienne, selon lesquelles, "contrairement à ce qui a été dit dans la déclaration marocaine", la RASD avait reçu une "invitation directe" du président de la Commission africaine. Ce à quoi, le Maroc a rétorqué que le sommet Ticad "ne constitue pas une réunion de l'Union Africaine, mais un cadre de partenariat entre le Japon et les pays africains avec lesquels il entretient des relations diplomatiques", selon un communiqué officiel. Selon Rabat, la Tunisie a invité "unilatéralement" M. Ghali au sommet "contre l'avis du Japon et en violation du processus de préparation". Pour le Maroc, il s'agit d'un "acte grave et inédit, qui heurte profondément les sentiments du peuple marocain". Au sujet de la position tunisienne sur le conflit du Sahara occidental, Rabat a rappelé que Tunis s'est abstenue de manière "inexpliquée" en octobre dernier lors de l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur cette question. Un acte qui "jette un doute sérieux et légitime sur son soutien au processus politique et aux résolutions des Nations Unies", souligne le communiqué marocain.
La question du Sahara occidental, ex-colonie espagnole considérée comme un "territoire non autonome" par l'ONU, oppose depuis des décennies le Maroc au Polisario, soutenu par l'Algérie voisine.
Rabat propose un plan d'autonomie sous sa souveraineté. Le Polisario réclame un référendum d'autodétermination sous l'égide de l'ONU, prévu lors de la signature en 1991 d'un cessez-le feu mais jamais concrétisé.
Anais Thibault
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