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Algérie/ Émirats Arabes Unis: les raisons d’une crise annoncée

À l’heure actuelle, un climat de tension enveloppe les rapports entre l’Algérie et les Émirats Arabes Unis, où des non-dits et de rumeurs trahissent l’existence d’une crise en gestation.


Les tensions entre les deux pays remontent à neuf mois déjà, en 2023, avant que le président Abdelmadjid Tebboune exprime publiquement ses regrets et son exaspération face aux « actions hostiles » des Emirats Arabes Unis.


Pour rappel, en juin 2023, le journal En Nahar avait révélé l'expulsion de l'ambassadeur des Émirats Arabes Unis en Algérie, ainsi que l'arrestation de quatre diplomates travaillant pour le compte du Mossad.


Le lendemain, le ministère des affaires étrangères algérien a nié catégoriquement ces informations à la télévision publique, affirmant que les relations entre les deux pays étaient au beau fixe, sans pour autant blâmer le journal En Nahar.


En juillet de la même année, le journal El Khabar a accusé les Émirats Arabes Unis d'avoir fourni au Maroc le logiciel espion israélien Pegasus pour surveiller l'Algérie.


Le journal a également accusé les Émirats Arabes Unis de mener des actions déstabilisatrices visant à isoler l'Algérie, exercer des pressions sur la Tunisie pour rompre ses relations avec l'Algérie et normaliser les relations avec Israël.


De plus, le journal a dévoilé qu'une tentative d'introduction de deux millions d'hallucinogènes sur le marché algérien via la Libye avait été déjouée par les services de sécurité.

 

Au cours du mois de mars dernier, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a clairement exprimé ses désaccords avec les Émirats Arabes Unis lors d'une conférence de presse devant les journalistes à la télévision nationale, déclarant que « la patience de l'Algérie a des limites ».


Cette escalade des tensions entre ces deux pays autrefois alliés soulève des questions sur les raisons de cette détérioration des relations, incitant les observateurs à analyser les enjeux géopolitiques et les intérêts en jeu.


Depuis l'arrivée au pouvoir de feu Abdelaziz Bouteflika en 1999, la relation entre l'Algérie et les Émirats Arabes Unis a connu une période de coopération fructueuse, jusqu'aux accords d'Abraham en 2020.


Bouteflika, lors de son mandat, avait favorisé les investissements des Émirats dans divers secteurs lucratifs en Algérie, en signe de reconnaissance pour leur soutien pendant ses moments difficiles.


En 2014, l’Algérie a marqué un tournant diplomatique sous l’égide de feu Gaid Salah, alors chef d’État-Major de l’armée. Gaid a établi des liens profonds avec les Émirats Arabes Unis, choisissant ce micro-Etat comme médiateur privilégié et partenaire dans les accords d’armement de l’Armée Nationale Populaire (ANP).


Jusqu’à son décès. Gaid Salah a été une figure plus présente à Abu Dhabi qu’à Alger, soulignant l’importance croissante de ces relations bilatérales.


Le décès de Gaid Salah et l’élection d’Abdelmadjid Tebboune à la présidence n’ont pas altéré le cours des relations algéro-émiraties, qui ont poursuivi leur évolution sans heurts.


Cependant, la donne a changé en septembre 2020, lorsque les Émirats Arabes Unis, aux côtés de Bahreïn, du Maroc et du Soudan, ont signé un traité de normalisation avec Israël. Cette démarche a provoqué l’ire d’Alger, d’autant plus que les liens avec le Maroc voisin se sont détériorés, aboutissant à une rupture diplomatique tumultueuse.


Les Émirats Arabes Unis, dans une démarche graduelle mais déterminée, ont commencé à révéler leur rôle influent sur l’échiquier international. Intervenant en coulisses, ils se positionnent comme un acteur clé dans divers conflits militaires, étendant leur présence du Yémen au Maroc.


Leur influence s’étend également au Soudan, à la Libye, ainsi qu’aux pays du Sahel - Mali, Niger et Burkina Faso - où leur implication directe dans les théâtres d’opérations militaires souligne une stratégie d’immersion globale.


Cette montée en puissance des Émirats soulève des questions sur leur impact futur dans la stabilité régionale et les équilibres de pouvoir.


Dans une série de tentatives confidentielles, l’Algérie a cherché à contester les avantages économiques octroyés aux Émirats Arabes Unis sur son territoire. Cependant, ces efforts se sont heurtés à l’inflexibilité des contrats commerciaux établis par les Émirats, des accords robustes et bien ancrés qui résistent aux tentatives de résiliation devant les tribunaux d’arbitrage international.


Cette impasse souligne la complexité et la solidité des engagements économiques des Émirats en Algérie, mettant en lumière les défis auxquels fait face le gouvernement algérien dans sa quête de rééquilibrage économique.

L’Algérie se trouve dans une position délicate, contrainte par les accords avec un partenaire de plus en plus belliqueux.


Les Émirats Arabes Unis, qui entretiennent des relations étroites avec les adversaires traditionnels de l’Algérie, le Maroc et Israël, accentuent la tension en menant des exercices militaires aux frontières algériennes. Cette situation met en évidence le dilemme auquel est confrontée l’Algérie : comment naviguer dans un paysage géopolitique complexe tout en étant liée par des engagements qui semblent favoriser ses rivaux.


Face à l’escalade des tensions diplomatiques, l’Algérie a choisi de riposter par des moyens médiatiques. Des articles de presse, orchestrés par les autorités, ont commencé à émerger, reflétant la position officielle du pays. Parallèlement, des voix politiques se sont élevées pour appuyer cette ligne dure.


Louiza Hanoune, chef de parti politique, a fait une déclaration retentissante avant-hier sur une radio-web, appelant à des mesures drastiques : « Il faut expulser l’ambassadeur des Émirats et couper les relations diplomatiques ».


Louiza Hanoune, figure de « l’opposition », est connue pour ses interventions dans des domaines qui dépassent souvent le cadre de ses attributions officielles. En venant au secours du pouvoir, elle suscite régulièrement le débat sur le rôle et l’espace d’action de l’opposition dans le paysage politique algérien.


Cependant, il est traditionnellement attendu que ce soit le ministre des Affaires étrangères, actuellement M. Ahmed Attaf, qui communique sur les enjeux internationaux et la position officielle de l’Algérie.


Les récentes déclarations de Hanoune, qui appellent à des mesures radicales contre les Émirats Arabes Unis, soulèvent des questions sur la séparation des pouvoirs et l’instrumentalisation des partis d’opposition sur la politique étrangère du pays.


Les déclarations du gouvernement algérien et du chef d’État-Major, qui mettent l’accent sur la nécessité de former un front interne solide, prennent un sens nouveau à la lumière des tensions diplomatiques actuelles.


Ces appels à l’unité nationale semblent être une réponse directe aux défis posés par les relations complexes avec les Émirats Arabes Unis et d’autres nations. Ils soulignent l’importance de la cohésion nationale en tant que pilier de la stabilité et de la sécurité du pays dans un contexte géopolitique incertain.


Bien que tout peuple puisse constituer une défense robuste contre les menaces extérieures, il est primordial de briser les chaînes qui entravent sa liberté d’action et d’expression pour y parvenir !


G.B

 

 

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