L'Algérie face à un recul des droits humains, selon le rapport 2025 d'Amnesty International
- cfda47
- 30 avr.
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Selon le dernier rapport d'Amnesty International publié hier 29 avril, la situation des droits humains en Algérie continue de se détériorer. L'organisation internationale dresse un tableau préoccupant des libertés fondamentales dans le pays, pointant du doigt ce qu'elle qualifie de “répression systématique de l'opposition politique” et un “rétrécissement constant de l'espace civique”.
Le rapport fait état de “la persistance des autorités algériennes à maintenir la fermeture de l'espace civique et à réprimer sévèrement les droits à la liberté d'expression, de réunion pacifique et d'association”. Selon Amnesty, “l'opposition pacifique continue d'être écrasée par le recours à des accusations infondées de terrorisme”, visant particulièrement “les militants politiques, les journalistes, les syndicalistes et les défenseurs des droits humains”.
Le cas de Mohamed Tadjadit, militant et poète, détenu “arbitrairement” pendant neuf mois suite à son arrestation le 29 janvier pour “terrorisme”, illustre cette tendance. De même, Hamza Kherroubi, président de l'Union algérienne des industries (UAI), a été condamné à 20 ans de réclusion pour des charges de terrorisme jugées "sans fondement" par l'organisation.
Restrictions des libertés fondamentales
D'après le rapport, “la liberté d'expression et de la presse a particulièrement souffert” avec la ratification le 28 avril d'une modification du Code pénal introduisant “des dispositions formulées en termes vagues facilitant les poursuites judiciaires pour des actes pourtant protégés par le droit international relatif aux droits humains”.
Le rapport mentionne également “la confirmation par la cour d'appel d'Alger de la dissolution arbitraire” du groupe de presse Interfaces Médias, suite à la condamnation de son directeur et fondateur, Ihsane El Kadi, à sept ans de prison. Bien qu'El Kadi ait été libéré le 1er novembre dans le cadre d'une grâce présidentielle accordée à environ 4 000 détenus, cette affaire témoigne, selon Amnesty, “des pressions exercées sur les médias indépendants”.
Restrictions à la liberté de circulation
Amnesty International souligne que “la législation algérienne a durci les peines encourues pour sortie illégale du territoire, les portant à trois ans d'emprisonnement contre six mois auparavant”. “Une nouvelle disposition prévoit également jusqu'à cinq ans d'incarcération pour quiconque facilite ou tente de faciliter la sortie illicite d'une personne du territoire algérien”, précise le rapport.
Le document pointe également “la persistance de dispositions discriminatoires à l'égard des femmes dans le Code pénal et le Code de la famille en matière d'héritage, de mariage, de divorce, de garde des enfants et de tutelle”. Au 23 décembre, le groupe militant Féminicides Algérie avait recensé “au moins 48 féminicides”, tandis que, selon Amnesty, “les statistiques officielles exhaustives sur les violences liées au genre demeurent inexistantes”.
Concernant les droits des personnes LGBTI, l'organisation note que “le Code pénal continue de condamner les relations sexuelles consenties entre adultes de même sexe, qui sont passibles d'une peine pouvant aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement assortis d'une amende”.
Répression religieuse
Le rapport affirme que “l'ordonnance n° 06-3, discriminatoire envers les adeptes de religions autres que l'islam sunnite, continue d'être utilisée pour violer les droits des personnes non musulmanes”. Selon l'Église protestante d'Algérie, citée par Amnesty, “46 de ses 47 églises restent fermées, soit pour cause de harcèlement judiciaire, soit par ordre des autorités”.
Droits des migrants et réfugiés
Amnesty International révèle que “l'Algérie a procédé à l'expulsion sommaire et collective d'au moins 31 404 personnes réfugiées, demandeuses d'asile ou migrantes vers le Niger”, selon les chiffres de l'organisation Alarme Phone Sahara.
Sur le plan économique, malgré “un ralentissement de l'inflation des prix alimentaires, celle-ci reste élevée (près de 5%)”, selon Amnesty, “menaçant les droits à l'alimentation, à la santé et au logement des catégories les plus pauvres de la population”. D'après la Banque mondiale, citée dans le rapport, “la nourriture représente plus de la moitié des dépenses des ménages chez les 40% les plus pauvres”.
Le rapport note cependant quelques mesures positives dans le budget 2024, notamment “des exonérations de taxes sur certains produits alimentaires, une augmentation d'environ 15% de l'échelle des salaires pour les employés du secteur public, et une revalorisation des allocations versées aux étudiants et aux personnes en situation de handicap ou sans emploi”.
En juillet, la Banque mondiale a modifié la classification de l'Algérie, “la faisant passer de revenu intermédiaire inférieur à revenu intermédiaire supérieur”, suite à une révision des statistiques des comptes nationaux entreprise par les autorités. Toutefois, cette amélioration économique ne semble pas s'accompagner, selon Amnesty International, “d'une progression correspondante en matière de respect des droits humains”.
La Rédaction
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