Les récentes révisions du projet de loi sur les sanctions répressives laissent songeur quant au respect des libertés publiques dans le pays. Sous couvert de moralisation et de lutte antiterroriste, ce texte aux formulations parfois vagues, ouvre la voie à des dérives sécuritaires et liberticides.
Ainsi, toute “parole portant atteinte à la pudeur” proférée dans l'espace public sera désormais passible de 2 à 6 mois de prison ferme, ainsi que d'une amende pouvant aller jusqu'à 10 millions de dinars. Cette disposition floue, sujette à interprétations, risque de brider la liberté d'expression. On peut craindre que toute critique véhémente du pouvoir ne soit assimilée à une offense à la pudeur publique.
Autre nouveau délit créé : la divulgation sur les réseaux sociaux d'informations “confidentielles” relatives à la sécurité nationale ou à l'économie du pays. Si c'est dans le but de “nuire aux intérêts de l'État”, l'auteur risquera 20 à 30 ans de détention provisoire ! De quoi sérieusement refroidir toute velléité de lanceurs d'alerte ou de journalistes d’investigation.
Par ailleurs, le simple fait de “faciliter l'accès à des ressources” pour des personnes ou entités inscrites sur les listes antiterroristes sera sanctionné de 1 à 3 ans de prison. Un champ d'application si large qu'il pourrait concerner nombre d'ONG ou d'associations caritatives.
Bref, derrière l'affichage moralisateur et sécuritaire, ces réformes répressives semblent surtout destinées à bâillonner toute critique du régime par crainte d'une nouvelle contestation populaire à quelques mois de l’élection présidentielle 2024. Au mépris des libertés fondamentales de la population, déjà largement mises à mal.
Sophie K.