Enlèvement parental et coordination judiciaire transfrontalière : une affaire révélatrice
- cfda47
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Le 28 octobre 2025, une fillette de cinq ans a été interceptée à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle alors qu’elle s’apprêtait à embarquer vers l’Algérie en compagnie de son père, auteur présumé d’un enlèvement parental. L’enfant avait été signalée disparue quelques heures plus tôt par sa mère, détentrice de l’autorité parentale exclusive. Grâce à une alerte rapide et à la mobilisation des services de sécurité, l’enfant a pu être récupérée avant son départ.
Juste avant l’embarquement vers l’Algérie, une fillette de 5 ans a été retrouvée après avoir été enlevée par son père. Ce sauvetage in extremis révèle les limites criantes des dispositifs de protection de l’enfance dans les contextes transfrontaliers.
Cadre juridique applicable
L’affaire met en lumière un vide juridique préoccupant dans la gestion des enlèvements parentaux impliquant la France et l’Algérie. Trois dispositifs encadrent — ou devraient encadrer — ce type de situation :
1. La Convention de La Haye du 25 octobre 1980 Ce texte international régit les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants. Il prévoit des procédures de retour rapide dans le pays de résidence habituelle de l’enfant. La France en est signataire, mais l’Algérie ne l’a pas ratifiée. Cette absence de réciprocité prive les autorités françaises d’un levier juridique essentiel pour obtenir le retour d’un enfant enlevé vers l’Algérie, et inversement.
2. Le Code civil français – Article 373-2-6 Selon cet article, le déplacement d’un enfant mineur par l’un des parents sans l’accord de l’autre, lorsqu’il détient l’autorité parentale exclusive, constitue une infraction pénale. Cette infraction est aggravée en cas de franchissement de frontière, notamment lorsqu’elle vise à soustraire l’enfant à la juridiction française.
3. La coopération bilatérale franco-algérienne Des accords spécifiques existent entre les deux États, notamment en matière de droit de la famille. Toutefois, ces dispositifs sont souvent jugés insuffisants, opaques ou inégalement appliqués. Les procédures de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires sont longues, et les mécanismes d’urgence quasi inexistants. Cette coopération souffre d’un manque de réciprocité, de transparence et d’efficacité, laissant les familles dans une insécurité juridique persistante.
Enjeux juridiques et diplomatiques
L’affaire met en lumière des failles structurelles dans la coopération judiciaire entre la France et l’Algérie, particulièrement en matière de protection de l’enfance. Trois enjeux majeurs se dégagent :
Un déficit de coordination judiciaire L’absence d’accord multilatéral spécifique entre les deux pays sur les enlèvements parentaux rend les procédures de retour d’enfants longues, incertaines et souvent inefficaces. En l’absence de mécanismes d’urgence ou de protocoles bilatéraux clairs, chaque affaire devient un parcours d’obstacles juridique, dépendant de la bonne volonté des autorités locales et consulaires.
Des risques de non-reconnaissance des décisions judiciaires étrangères Les jugements rendus par les tribunaux français ne sont pas automatiquement reconnus ni exécutés en Algérie, et inversement. Cette absence de réciprocité crée une insécurité juridique pour les familles binationales, qui se retrouvent confrontées à des décisions contradictoires ou inapplicables selon le territoire.
Une protection insuffisante des enfants binationaux Les enfants issus de couples franco-algériens sont particulièrement vulnérables. Ils évoluent dans un entre-deux juridique où les divergences de droit familial — notamment sur l’autorité parentale, le droit de garde ou le statut de la mère — peuvent compromettre leur sécurité et leur stabilité. Ces enfants paient le prix des tensions diplomatiques et des incompatibilités législatives, alors même qu’ils devraient bénéficier d’une protection renforcée.
Cette affaire, bien qu’isolée dans sa résolution rapide, illustre les failles structurelles de la coopération judiciaire entre la France et l’Algérie en matière de protection de l’enfance. Elle appelle à une mobilisation juridique, diplomatique et citoyenne pour que les droits fondamentaux des enfants ne soient plus tributaires des frontières ni des tensions bilatérales.
Nadia B



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