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Ahmed Attaf sur le vote français : “C'est la course à l'échalote qui se poursuit”

  • cfda47
  • il y a 1 jour
  • 3 min de lecture
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Le vote de jeudi à l'Assemblée nationale française n'a pas échappé à Alger. À une voix près, les députés ont adopté une résolution pour dénoncer l'accord de 1968 régissant l'immigration algérienne. Pour Ahmed Attaf, le ministre des Affaires étrangères, c'est surtout le signe d'une France qui fait de l'histoire algérienne un instrument de ses calculs électoraux.  


Il y a trois jours, jeudi 30 octobre, l'Assemblée nationale française a basculé. À une voix près, un projet de résolution du Rassemblement national visant à dénoncer l'accord franco-algérien de 1968 était adopté. Ce texte, qui régit depuis plus d'un demi-siècle l'immigration algérienne en France, est devenu le terrain d'une bataille politicienne où l'extrême droite et les macronistes se disputent la palme de la fermeté.  


Depuis Alger, on a suivi le spectacle avec un mélange d'incrédulité et de déception. Ahmed Attaf, le chef de la diplomatie algérienne, ne mâche pas ses mots dans un entretien accordé  ce dimanche à AL24 News : “Très sincèrement, j'ai beaucoup de respect pour l'Assemblée nationale française, mais lorsque j'ai vu ce vote, la première pensée qui m'est venue à l'esprit : c'est la course à l'échalote qui se poursuit.”  


La formule est imagée, presque familière. Mais derrière, il y a une frustration palpable. Voir un pays “aussi grand que la France” faire de l'histoire d'un autre pays, “indépendant et souverain”, l'objet d'une “compétition électorale anticipée”, cela provoque chez le ministre algérien une forme de tristesse qu'il n'hésite pas à exprimer publiquement.  


Sur le plan diplomatique, Attaf reste pragmatique. Il considère cette agitation comme une “affaire franco-française, entre l'Assemblée nationale et le gouvernement français”. Autrement dit, une bataille interne qui ne concerne pas directement Alger. “C'est une affaire intérieure qui ne nous concerne pas pour le moment”, insiste-t-il.  


Car le ministre pose clairement les lignes rouges : “Elle pourrait nous concerner si ça devient une affaire de gouvernement à gouvernement parce que l'accord de 1968 est un accord intergouvernemental, un accord international”. Et à ce jour, précise-t-il, “le gouvernement français n'a rien dit à l'Algérie sur ce sujet”.  


Autrement dit, tant que Paris n'officialise pas une volonté de renégocier ou de dénoncer l'accord par la voie gouvernementale, Alger reste spectateur. “Au plan gouvernemental, nous n'avons rien vu venir, et nous espérons ne rien voir venir”, conclut Ahmed Attaf.  


Mais au-delà de la posture diplomatique, le ministre algérien tient à remettre les pendules à l'heure. Parce qu'en France, entre politiques et médias, la méconnaissance de cet accord semble généralisée. “Certains politiques et médias français ont une connaissance très biaisée de l'accord de 1968”, déplore-t-il.  


Et là, Attaf frappe fort. Contrairement à ce qui circule dans le débat français, cet accord n'a jamais été un cadeau fait à l'Algérie. “Il n'a jamais été libéral pour favoriser l'immigration algérienne, bien au contraire. Il est venu établir des restrictions par rapport au régime établi par les Accords d'Évian. C'est un accord historique restrictif.”  


Aussi, ce que beaucoup en France présentent aujourd'hui comme un privilège indu accordé aux Algériens était, en réalité, un durcissement des conditions d'immigration par rapport à la période coloniale. Les faits historiques contredisent la rhétorique politique actuelle.  


Autre point de tension, le coût supposé de cet accord pour la France. Un rapport établi par deux députés macronistes évalue ce coût à “deux milliards d'euros par an”. Une somme qui circule désormais comme une vérité établie dans les débats français.  


Ahmed Attaf balaie ces calculs d'un revers de main. “On attribue beaucoup de choses. J'ai entendu récemment qu'il coûtait à la France deux milliards d'euros, ce qui m'a rappelé l'aide au développement, ce qui n'a rien à voir avec la réalité. C'est totalement infondé. Ce sont des chiffres fantaisistes.”  


La référence à “l'aide au développement” n'est pas non plus innocente. Elle rappelle ces discours français qui gonflent artificiellement les montants de leur coopération avec l'Algérie, alors que la réalité sur le terrain raconte une tout autre histoire.  


Pour l'instant, Alger s'en tient à sa position. Tant que le gouvernement français ne franchit pas la ligne rouge en transformant ce psychodrame parlementaire en position gouvernementale officielle, il n'y a pas matière à réagir.  


Sophie A.  


 
 
 
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