Algérie–Niger : une coopération migratoire sous tension
- cfda47
- il y a 18 heures
- 3 min de lecture

Depuis 2024, l’Algérie a intensifié sa politique d’expulsion des migrants subsahariens, en particulier vers le Niger, son voisin sahélien. Plus de 16 000 personnes ont été refoulées depuis avril 2025, selon les autorités nigériennes, dans des conditions dénoncées par plusieurs ONG comme étant inhumaines.
Depuis plusieurs années, la frontière désertique entre l’Algérie et le Niger est le théâtre de refoulements massifs de migrants, souvent opérés dans des conditions alarmantes. Face à cette situation, de nombreuses ONG tirent la sonnette d’alarme et proposent des alternatives concrètes, respectueuses de la dignité humaine et du droit international.
Au nom d’un accord discret signé en 2014, l’Algérie expulse chaque mois des milliers de migrants subsahariens vers le Niger. Officiellement, il s’agit de retours encadrés. En réalité, c’est une déportation silencieuse, brutale, sans droits ni recours.
Des hommes, des femmes, des enfants, originaires du Mali, de Guinée, de Côte d’Ivoire, sont entassés dans des camions, puis largués à la frontière, à Assamaka, au milieu du désert. Ils marchent des heures dans le sable brûlant, parfois pieds nus, sans eau, sans vivres, sous un soleil assassin. Ce n’est pas de la politique migratoire. C’est un abandon organisé, une atteinte fondamentale à la dignité humaine.
Un accord bilatéral discret mais actif
Ces expulsions s’inscrivent dans le cadre d’un accord signé en 2014 entre Alger et Niamey, permettant le renvoi régulier de migrants nigériens en situation irrégulière. Toutefois, ce mécanisme officiel est doublé de pratiques plus opaques : de nombreux migrants d’autres nationalités (Ivoiriens, Maliens, Guinéens…) sont également expulsés, souvent sans coordination préalable, et abandonnés à la frontière dans des zones désertiques où les températures dépassent les 45 °C.
Le Niger, carrefour migratoire sous pression
Le Niger, déjà fragilisé par des crises politiques et économiques, se retrouve en première ligne. Les centres de transit d’Agadez et d’Assamaka, gérés par l’OIM, sont saturés. Face à cette urgence, des pays comme la Côte d’Ivoire ont lancé des opérations de rapatriement volontaire, comme celle du 18 juin 2025, où 125 Ivoiriens ont été ramenés à Abidjan avec un accompagnement psychosocial et économique.
Les centres de transit débordent, les ONG suppléent les États défaillants. Pendant ce temps, certains gouvernements ferment les yeux, invoquant le prétexte commode de la “lutte contre les passeurs”. Mais qui sont les vrais trafiquants ? Ceux qui exploitent la misère ou ceux qui déshumanisent des êtres humains au nom d’accords bilatéraux opaques ?
Une crise aux multiples visages
Ce partenariat migratoire soulève des critiques croissantes. L’ONG Alarme Phone Sahara dénonce des violations des droits humains : migrants abandonnés sans eau ni nourriture, séparations familiales, confiscation de biens personnels. L’Algérie, de son côté, justifie sa politique par des impératifs sécuritaires, notamment la lutte contre les réseaux de trafic et le terrorisme dans la région sahélienne.
Cette affaire met en lumière les tensions entre gestion sécuritaire des frontières et respect des droits humains, dans un contexte où les flux migratoires ne cessent de croître.
Les alternatives humanitaires face aux expulsions massives de migrants entre l’Algérie et le Niger
La suspension immédiate des expulsions constitue une exigence majeure. Les organisations comme Alarme Phone Sahara dénoncent des pratiques qu’elles jugent inhumaines : confiscation de biens, séparations familiales, abandon sans assistance en plein désert. Pour éviter ces abus, les ONG préconisent la mise en place de couloirs humanitaires et la présence d’observateurs indépendants lors des opérations de retour.
L'appui aux structures d’accueil est essentiel. Les centres de transit au Niger, notamment à Agadez et Assamaka, sont aujourd’hui débordés. Les ONG plaident donc pour un soutien logistique renforcé, ainsi qu’un accompagnement médical et psychosocial des migrants en transit ou en attente de réinsertion.
La coopération régionale est jugée indispensable. L’Union africaine, la CEDEAO et la CEMAC sont appelées à jouer un rôle plus actif pour encadrer les politiques migratoires dans le respect des droits humains. Les ONG soulignent également la responsabilité indirecte de l’Union européenne, accusée de sous-traiter la gestion des flux migratoires à des pays tiers sans garanties suffisantes.
Enfin, les programmes de retour volontaire et assisté apparaissent comme une alternative plus éthique. Ces dispositifs, mis en place par certains États comme la Côte d’Ivoire avec l’aide d’organisations internationales, offrent aux migrants une possibilité de retour dans leur pays d’origine avec un accompagnement à la réinsertion sociale et économique.
Loin de se limiter à une critique, ces propositions dessinent une autre voie possible, fondée sur la solidarité, la coopération régionale et le respect de la dignité humaine. Elles appellent à repenser les politiques migratoires dans une logique de justice plutôt que de coercition.
La rédaction
Comments