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La bataille médiatique vue du gouvernement algérien

  • cfda47
  • il y a 20 minutes
  • 3 min de lecture

« Il faut défendre le pays ».  Debout face à des dizaines de journalistes, réunis lundi 29 avril à l’hôtel El-Aurassi à Alger, le regard sévère, la mine refrognée et le doigt à tantôt accusateur tantôt ordonnateur, le ministre algérien de la Communication Mohamed Meziane a encore sorti cette injonction, devenue leitmotiv depuis sa nomination à la tête du ministère en novembre 2024.


Cette rencontre avec les hommes et femmes des médias est la quatrième qu’organise et préside Mohamed Meziane depuis le début de l’année. Dans chacun de ces conclaves, il répète quasiment le même discours, les mêmes directives : « Le pays fait face à une menace extérieure. Il est nécessaire de créer un front médiatique intérieur pour affronter » cette situation.


Dans ce lot de ces périls, le responsable fait référence aux attaques venant de France, mais également des fausses informations qui viseraient l’Algérie. Mais dans ces discours aux accents patriotiques, Mohamed Meziane ne donne aucun contenu concret. Il se contente d’adresses moralisantes, des directives incitant les journalistes à « faire émerger » ce qui est « positif » dans l’action du gouvernement. A faire de la propagande !


La liberté oubliée…

A part ces injonctions, le ministre de la Communication n’a pas abordé la question de la liberté de la presse. Pourtant, « ce dont la presse a besoin est une liberté dans le cadre d’une éthique professionnelle », a résumé Idir Dahmani, journaliste au long parcours et ancien dirigeant du Syndicat national des journalistes (SNJ). « Le seul défi et le seul enjeu pour la presse nationale est la liberté d’expression », a noté, pour sa part Abdelali Mezghiche, un journaliste travaillant pour la télévision d’Etat.


Un avis que partagent beaucoup d’autres professionnels des médias et du syndicat national des journalistes algériens qui a publié une longue résolution dans laquelle la nécessité de laisser les journalistes accomplir leur travail librement occupe une bonne place.


Dans les faits, les autorités ferment tous les espaces médiatiques depuis plusieurs années. En plus de l’isolement de certains journalistes, dont certains sont interdits d’écriture ou d’antenne depuis qu’un de leurs articles n’a pas plu aux autorités alors que d’autres sont licenciés, des médias subissent des pressions économiques ou un chantage à la publicité à cause de contenus qui ne plaisent pas aux décideurs.


Le journal francophone El Watan est par exemple privé de publicité depuis la publication, à l’été 2020, d’un article portant sur des biens supposés indus de la famille de l’ancien chef d’Etat-Major de l’Armée, Ahmed-Gaïd Salah.


D’autres médias vivent la même situation. Ce qui s’ajoute à des pressions directes exercées par les autorités sur des médias. Résultat : les Algériens ne lisent plus d’enquêtes journalistiques, ni d’éditoriaux critiques envers le pouvoir. « La pire situation de la presse algérienne depuis l’indépendance ; c’est pire que durant la période du parti unique », résume un ancien journaliste qui rappelle que la publication ou la diffusion d’une simple information peut valoir à sn auteur des ennuis.


Cette situation de précarité prive de nombreuses entreprises de presse de ressources financières suffisantes pour offrir des salaires décents à leurs journalistes. Dans quasiment toutes les entreprises privées, les salaires ne sont versés que de manière aléatoire, rendant ainsi leur situation de plus en plus précaire, ce qui impacte évidemment leur rendement et hypothéquant leur liberté. On ne part pas à la guerre le ventre creux !



Essaïd Wakli

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