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Lutte contre la drogue: le ministre de la Justice veut enjamber la présomption d’innocence

  • cfda47
  • il y a 12 heures
  • 2 min de lecture

Lors d’une intervention devant les députés de l’Assemblée populaire nationale, le ministre algérien de la Justice, Lotfi Boudjema a annoncé qu’après l’adoption de la nouvelle version du Code pénal, la justice aura le droit de rendre publique l’identité, voir la photographie, des trafiquants de drogue. Le ministre a insisté sur le fait que cette exposition ne se fera que pour les « grands barons » et que cela ne sera possible qu’en cas de flagrant délit. « Je ne parle pas de soupçons » ; a-t-il insisté.


Le représentant du gouvernement espère, par cette annonce ou décision, dissuader les trafiquants de drogue. Pour cela il donne une image complètement farfelue : « Lui (le trafiquant) n’a pas honte de dissimuler des millions de psychotropes et moi j’aurais honte de publier son identité et de le montrer de doigt devant les Algériens ! », s’est-il exclamé. Il jette ainsi un homme -même soupçonné de trafic de drogue- à la vindicte populaire et foule au pied un principe universel : la présomption d’innocence.


Ceux qui connaissent ce milieu savent en effet que cette probabilité pourra servir de base à de graves dépassements. Une bande peut parfaitement utiliser cette situation pour abattre une autre bande rivale en recourant à des techniques permettant par exemple de diffuser de fausses images ou à des montages photographiques qui peuvent être utilisés pour chantage.


Mais c’est surtout la présomption d’innocence qui est jeté aux orties, trainée dans la boue à travers cette décision. Comment alors protéger la liberté des citoyens Algériens lorsqu’on sait qu’il suffit de jeter un bout de drogue dans la poche ou la voiture d’un jeune pour ensuite se servir de cette « pièce à conviction » comme « preuve de culpabilité » contre lui. C’est tellement pernicieux et même dangereux. Cela n’a pas pour vocation de donner plus de crédit à la justice. Bien au contraire.


Dans le même sillage, le Garde des Sceaux a préconisé de rémunérer les dénonciateurs des trafiquants de drogue. Or, nous le savons, des lanceurs d’alerte contre des affaires de corruption sont passés au statut d’accusés alors qu’ils doivent être protégés par loi.


Le cas de Noureddine Tounsi, qui a souvent dénoncé des affaires de corruption au Port d’Oran, est un exemple parfait du sort injuste qui peut être réservé à ce genre de citoyens. L’homme est condamné à plusieurs années de prison pour cela ! C’est pourquoi, la traque des trafiquants de drogue doit d’abord commencer par les gros bonnets -qui parviennent souvent à s’en sortir- et par un renseignement sérieux et discret en plus d’une stricte application de la loi. Or, les récidivistes sont là, connus de tous. Ils ne craignent presque plus rien, plus personne. Ils sont souvent arrêtés, emprisonnés, mais arrivent à sortir de prison ou plus que cela, ils bénéficient souvent de mesures de grâce présidentielle.


La lutte contre la drogue et les stupéfiants est certes l’affaire de tous ; donc de toute la société. Mais le rôle de l’Etat, qui doit être irréprochable, est déterminant.


E. Wakli

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