Palestine, exil, mémoire …Hmida Layachi à Kamel Daoud : “Sortons au grand jour”
- cfda47
- 28 sept.
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Dernière mise à jour : 29 sept.

Dans une lettre ouverte, Hmida Layachi accuse Kamel Daoud d’avoir tourné le dos à la cause palestinienne et l’invite à un débat public.
Il arrive que les querelles privées débordent dans l’espace public, révélant les lignes de fracture d’une époque. C’est le cas de l’écrivain et journaliste Hmida Layachi, qui a choisi d’adresser une lettre ouverte à Kamel Daoud, après un échange personnel qu’il juge “empreint de colère, de contre-vérités et d’accusations injustifiées”.
“J’ai été choqué que tu considères ma critique de tes positions comme une forme de soumission au régime algérien ou un alignement sur le pouvoir. La vérité, c’est que ce que j’ai critiqué chez toi, c’est ce que j’ai perçu comme un abandon flagrant de la cause nationale et de la cause palestinienne-une dérive, consciente ou non, vers les discours de lobbys qui justifient l’occupation et couvrent ses crimes sous prétexte de “lutte contre le terrorisme palestinien” ou contre “le terrorisme du Hamas”, et ta complaisance envers l’État israélien”, écrit Layachi dans un texte publié sur son compte Facebook.
La charge est directe. Elle s’inscrit dans une longue tradition intellectuelle où la polémique n’est pas une simple querelle d’ego, mais une bataille de sens. Sartre, dans ses échanges avec Camus, rappelait que “la vérité est toujours révolutionnaire”. Ici, Layachi oppose frontalement son attachement aux causes algérienne et palestinienne à ce qu’il décrit comme une complaisance de Daoud vis-à-vis des récits dominants, ceux qui justifient la violence d’État au nom de la lutte contre le terrorisme.
“Sortons au grand jour. Parlons à voix haute de ce paradis français illusoire qui t’a volé ce qu’il y avait de plus fort dans ton esprit créatif, et qui t’a transformé d’un écrivain en quête de liberté en une voix justifiant la brutalité israélienne envers les Palestiniens. Mettons tes idées face à mes positions, dont j’assume l’entière responsabilité”, poursuit Layachi, qui appelle à un débat public.
Ce débat, il le veut “écrit ou filmé, en direct, sur la plateforme de ton choix”. “Le public a le droit d’entendre, de juger, de décider : lequel de nous a choisi de défendre les valeurs et la justice, et lequel s’est confondu avec les forces du mal ?” ajoute-t-il, refusant que ses prises de position soient assimilées à une quelconque ligne officielle.
L’écrivain rappelle enfin sa propre conception de la critique :
“J’ai appris à dire mes opinions telles que je les pense -même quand elles vont à contre-courant du pouvoir ou qu’elles dérangent les lobbys qui influencent les décisions internationales. Pour moi, la critique n’est ni soumission ni suivisme : elle est fidélité à une conscience qui ne transige pas”.
Ce texte n’est pas une simple lettre, il est une convocation publique. Comme le rappelait Edward Saïd, la mission de l’intellectuel est d’“oser la dissidence”, même au prix de la solitude. En interpellant Kamel Daoud, Hmida Layachi ne cherche pas seulement à régler un différend; il remet en scène une vieille querelle algérienne, celle du rapport à l’exil, à la mémoire et à la cause palestinienne. Une querelle où les mots pèsent, parce qu’ils engagent, et où le silence ne peut être qu’un choix-ou une défaite.
Sophie K.



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