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1er Novembre 2025 : L’Algérie face à son histoire, entre mémoire brûlante et avenir incertain

  • cfda47
  • il y a 5 jours
  • 3 min de lecture
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Le 1er novembre 1954, l’Algérie entrait dans l’histoire par le feu et le sang. Ce jour-là, le Front de libération nationale lançait une série d’attaques coordonnées contre les symboles du pouvoir colonial français. Ce fut le début d’une guerre longue, douloureuse, mais fondatrice. Soixante-et-onze ans plus tard, que reste-t-il de cet élan révolutionnaire ? Que devient l’Algérie, héritière d’un combat pour la dignité, la souveraineté et la justice ?


Le 1er novembre 1954, dans la nuit de la Toussaint, des dizaines d’attaques coordonnées par le Front de libération nationale (FLN) embrasent le territoire algérien. Aujourd’hui, 71 ans plus tard, l’Algérie commémore cette date fondatrice dans un climat de paradoxes. Si la souveraineté politique est acquise, la souveraineté économique, sociale et symbolique reste en chantier.


Alors que le pays commémore le 1er novembre et le déclenchement de sa guerre de libération, la situation des droits humains en Algérie soulève de vives inquiétudes. Les différents rapports d’Amnesty International, Human Rights Watch et du Haut-Commissariat des Nations Unies dressent un tableau sombre : répression des voix dissidentes, criminalisation des défenseurs des droits, et violations graves dans les centres de détentions. Des militants, journalistes et hommes d’affaires sont régulièrement soumis à des interdictions de sortie du territoire (ISTN), utilisées comme outil de contrôle politique. Cette pratique, dénoncée par les ONG, limite la liberté de mouvement et sert à isoler les voix critiques.


Une mémoire toujours vive, mais en tension

Chaque année, le 1er novembre est célébré avec ferveur officielle : dépôts de gerbes, discours patriotiques, hommages aux martyrs. Mais derrière les cérémonies, la mémoire nationale reste fragmentée. Les jeunes générations, souvent désabusées, peinent à se reconnaître dans un récit figé, parfois instrumentalisé. Les anciens combattants, eux, dénoncent l’oubli, la récupération, et l’effacement des idéaux de 1954.

« Nous avons combattu pour une Algérie libre et juste, pas pour une rente mémorielle », confie un moudjahid à Constantine.
Une indépendance politique acquise, une souveraineté sociale en suspens

L’Algérie est indépendante depuis 1962. Mais la souveraineté réelle — économique, sociale, culturelle — reste incomplète. En 2025, le pays fait face à des défis structurels. Une économie toujours dépendante des hydrocarbures. Un chômage endémique, notamment chez les jeunes diplômés. Une crise de confiance envers les institutions et les libertés fragilisées, malgré les aspirations citoyennes.


La liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association est sévèrement restreinte. Les médias indépendants sont muselés, et les procès politiques se multiplient. Le Hirak, mouvement populaire né en 2019, a révélé une soif de changement profond. Mais les réponses politiques sont restées limitées, souvent répressives.


L’Algérie dans le monde : entre isolement et repositionnement

Sur le plan international, l’Algérie tente de jouer un rôle d’équilibre : soutien à la Palestine, médiation au Sahel, rapprochement avec la Chine et la Russie. Mais la diplomatie algérienne souffre d’un manque de cohérence et de visibilité, notamment auprès de la diaspora et des jeunes générations.


La culture, pourtant riche et puissante, peine à s’exporter. Le cinéma, la littérature, la musique — autant de vecteurs de rayonnement — restent sous-financés et marginalisés.


Une révolution à poursuivre

Le contraste est saisissant : le pays célèbre une guerre pour la dignité et la liberté, tout en réprimant celles et ceux qui réclament ces mêmes droits aujourd’hui. La mémoire du 1er novembre devient un miroir critique : elle rappelle que l’indépendance ne se limite pas à la souveraineté territoriale, mais exige la justice, la liberté et le respect des droits humains.


L’Algérie post-indépendance a connu des décennies de centralisation, de nationalisation et de luttes internes. Le 1er novembre 1954 fut un cri de dignité. En 2025, ce cri résonne encore, mais il demande à être réactualisé. La révolution ne peut rester figée dans le passé : elle doit s’incarner dans les luttes présentes, dans les combats pour la justice sociale, la liberté d’expression, la reconnaissance des mémoires plurielles.

« L’indépendance ne se commémore pas, elle se construit chaque jour », écrivait Kateb Yacine.
Mémoire, dignité, insubordination

L’Algérie d’aujourd’hui est à la croisée des chemins. Elle peut choisir de rester prisonnière d’un récit glorieux mais figé, ou bien réinventer son avenir à partir de ses douleurs, de ses résistances, et de ses espérances. Le 1er novembre n’est pas une fin, c’est un commencement. Un appel à l’insubordination éthique, à la dignité active, à la mémoire vivante.


Le 1er novembre n’est pas qu’un anniversaire : c’est un appel à la lucidité. L’Algérie d’aujourd’hui est le fruit d’un combat héroïque, mais elle est aussi le théâtre d’un présent incertain. La révolution de 1954 a libéré le territoire, mais celle de 2025 doit libérer les consciences, les institutions et les imaginaires.


La mémoire ne suffit pas. Il faut une vision. Et cette vision ne peut naître que d’un dialogue sincère entre les générations, d’un sursaut éthique, et d’un engagement collectif pour une Algérie digne de ses martyrs.


Yacine M

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