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Algérie: les défis de l’égalité des genres entre conventions internationales et réalités locales

  • cfda47
  • 15 déc. 2024
  • 3 min de lecture
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Lors d’une conférence organisée par Amnesty International à l’occasion des 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes, maître Nacera Haddouche, avocate, militante des droits humains et membre du collectif CNLD, a livré une intervention marquante sur les enjeux de l’égalité entre les sexes en Algérie.


S’appuyant sur les cadres juridiques internationaux et nationaux, Maître Hafdouche a mis en avant l’importance des instruments tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), les pactes internationaux et la Constitution algérienne.


Cependant, elle a également souligné que, malgré leur adoption, ces dispositifs restent entravés par les réserves émises par l’État algérien et par des lacunes persistantes dans leur mise en œuvre concrète.


La ratification de conventions internationales, comme la CEDAW, engage théoriquement l’Algérie à respecter les principes fondamentaux qu’elles énoncent, notamment l’égalité entre les hommes et les femmes.


Cependant, Nacera Haddouche a expliqué que les réserves posées par l’Algérie sur certaines dispositions des conventions affaiblissent leur portée sur le territoire national. Ces réserves, souvent motivées par des considérations socioculturelles ou religieuses, deviennent, selon elle, des « pierres angulaires » qui freinent l’application effective de ces normes.


Par exemple, bien que l’article 154 de la Constitution algérienne affirme la primauté des traités internationaux sur les lois nationales, en pratique, des contradictions subsistent entre ces traités et des textes locaux comme le Code de la famille. Cette situation rend difficile la mise en œuvre des droits garantis par ces instruments internationaux.


Nacera Haddouche a également évoqué l’importance des mécanismes internationaux, comme les protocoles additionnels, qui permettent de concrétiser les principes des conventions. Ces protocoles fournissent des outils pratiques pour adapter les textes aux spécificités régionales, en l’occurrence africaines, tout en respectant les réalités locales.


Elle a toutefois dénoncé le fait que l’Algérie a également émis des réserves sur ces mécanismes, limitant ainsi leur efficacité. Par ailleurs, elle a souligné le rôle des institutions judiciaires nationales, comme les juges et les magistrats, qui peuvent directement appliquer les conventions ratifiées pour développer une jurisprudence locale favorable à l’égalité des genres.


Un autre point crucial soulevé est le manque de compréhension, chez de nombreuses femmes algériennes, des droits qui leur sont théoriquement garantis. « Nous avons des textes, mais comment les appliquer ? », s’est-elle interrogée. Ce défi est amplifié par des interprétations biaisées des devoirs et droits dans les relations homme-femme. Elle a illustré cela par l’exemple du viol conjugal, encore perçu dans la législation algérienne comme un devoir marital pour la femme, en opposition aux standards internationaux.


Haddouche a appelé à un dialogue permanent et constructif pour sensibiliser la société et promouvoir un développement juridique basé sur des cas concrets. Elle a rappelé que des avancées législatives dans d’autres pays, comme la France, ont souvent été obtenues grâce à des recours individuels répétés, soutenus par des associations militantes.


Enfin, elle a mis en lumière l’importance des recours auprès des instances internationales, comme la Commission africaine des droits de la femme. Ces mécanismes permettent aux victimes, accompagnées d’associations agréées, de demander justice lorsque les recours internes sont épuisés. Cependant, elle a noté une différence flagrante entre l’Algérie et les pays européens, où les décisions des commissions internationales sont davantage respectées.


Pour Nacera Haddouche, les instruments juridiques nationaux et internationaux sont des outils puissants, mais ils restent insuffisants tant que leur application sur le terrain est entravée. Elle a appelé à une mobilisation collective des associations, des institutions et des citoyens pour dépasser les blocages actuels et bâtir une société véritablement égalitaire.


Son message résonne comme un appel à l’action : l’égalité des genres en Algérie nécessite non seulement des textes, mais aussi un engagement concret et des mécanismes efficaces pour transformer ces droits théoriques en réalités quotidiennes.



Nadia. B

 
 
 

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