top of page

Boualem Sansal : une lourde peine requise en appel contre l’écrivain

  • cfda47
  • 24 juin
  • 3 min de lecture
ree

Le procureur général de la Cour d'appel d'Alger a requis mardi, dix ans de prison ferme et une amende d'un million de dinars contre l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Cette réquisition, prononcée lors d'une audience de moins de quinze minutes, double la peine de première instance. Le verdict sera rendu le 1er juillet. 


Dans son réquisitoire, le représentant du parquet a développé une argumentation sévère contre l'accusé de 75 ans, détenu depuis novembre 2024. Le procureur a rappelé que Boualem Sansal était né, avait grandi, étudié, travaillé et été soigné en Algérie, mais qu'il n'avait “jamais été reconnaissant envers son pays”. Cette formulation traduit la vision du ministère public d'une trahison de la part d'un homme qui aurait bénéficié des institutions algériennes avant de les critiquer.


L'accusation porte principalement sur des déclarations faites en octobre 2024 au média français d'extrême droite Frontières, où Sansal estimait que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant au Maroc. Le procureur général considère ces propos comme une atteinte directe à l'intégrité territoriale de l'État algérien.


La réquisition de dix ans de prison correspond exactement à celle formulée en première instance par le parquet du tribunal de Dar El Beida le 20 mars dernier. À l'époque, le tribunal avait rendu une décision plus clémente en condamnant l'écrivain à cinq ans de prison ferme et 500 000 dinars d'amende. Le procureur général maintient donc sa position initiale devant la cour d'appel.


Cette sévérité du réquisitoire s'explique par la nature des chefs d'accusation retenus contre Sansal, à savoir “atteinte à l'unité nationale”, “outrage à corps constitué”, “pratiques de nature à nuire à l'économie nationale” et “détention de vidéos et publications menaçant la sécurité du pays”. Le procureur a insisté sur la gravité de ces faits, qu'il considère comme prouvés par les éléments retrouvés dans le téléphone et l'ordinateur de l'accusé.


Face à ces accusations, Boualem Sansal maintient sa ligne de défense. L'écrivain, qui a choisi d'assurer lui-même sa représentation, refuse de voir dans ses déclarations autre chose que l'exercice de sa liberté d'expression. “Je n'ai rien à dire. Je suis un homme libre. Je parle à tout le monde, et je parle en France, pas en Algérie. Je suis français et toutes mes déclarations ont été faites en France”, avait-il déclaré lors de sa première comparution, selon Casbah Tribune qui a assisté au procès.


L'écrivain avait également précisé sa position concernant les frontières : “J'ai simplement dit que les frontières actuelles ont été tracées par les Français, qu'elles sont héritées de la colonisation. Et j'ai rappelé que l'Union africaine a confirmé l'intangibilité de ces frontières après les indépendances”, toujours selon Casbah Tribune.


Interrogé sur ses convictions, Sansal avait répondu : “Oui, j'en suis convaincu. Mais on peut aussi changer d'avis dans la vie”, d'après la même source. Cette réponse nuancée n'a visiblement pas convaincu le procureur général, qui maintient ses réquisitions.


Il faut dire que les relations entre l’Algérie et la France traversent leur plus grave crise depuis la guerre d'indépendance, aggravée par la reconnaissance française du plan d'autonomie marocain pour le Sahara occidental en juillet 2024. L'arrestation de Sansal à son arrivée à Alger le 16 novembre a amplifié ces tensions.


Les autorités françaises, du président Macron au ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, multiplient les appels à la libération de l'écrivain, particulièrement en raison de son état de santé. Sansal souffre d'un cancer de la prostate, ce qui suscite l'inquiétude de Paris quant aux conditions de sa détention.


Toutes les demandes françaises de libération ou de grâce présidentielle sont restées sans réponse des autorités algériennes. Le gel complet des coopérations bilatérales et les expulsions de diplomates de part et d'autre témoignent de la profondeur de la crise. 

 

Amine B.

Comments

Rated 0 out of 5 stars.
No ratings yet

Add a rating
bottom of page