Condamnation de Djamila Bentouis et grâce présidentielle: deux faces de la justice algérienne

Dans un contraste saisissant illustrant la dualité du système judiciaire algérien, le 4 juillet 2024 a vu la condamnation de la militante franco-algérienne Djamila Bentouis à 2 ans de prison ferme, tandis que le président Abdelmadjid Tebboune annonçait une grâce pour plus de 8 000 détenus.

Bentouis, 60 ans, mère de trois enfants, a été condamnée pour avoir simplement écrit et chanté une chanson critiquant la répression du mouvement Hirak. Son cas met en lumière la sévérité persistante envers les voix dissidentes, même celles de la diaspora. Arrêtée lors d'un voyage pour dire adieu à sa mère mourante, Bentouis s'est retrouvée prise dans les filets d'un appareil judiciaire de plus en plus hostile aux critiques du régime.

Parallèlement, la grâce présidentielle, présentée comme un geste de clémence, révèle une stratégie calculée du pouvoir. En excluant explicitement les détenus d'opinion, le régime envoie un message clair : la dissidence politique reste inacceptable. Cette exclusion souligne la nature sélective de la justice algérienne, où les prisonniers de droit commun peuvent bénéficier de clémence, tandis que les voix critiques sont systématiquement marginalisées et réprimées.

Cette dualité judiciaire - clémence pour certains, répression pour d'autres - témoigne d'une stratégie visant à donner l'illusion d'un assouplissement tout en maintenant une main de fer sur l'opposition. Le cas Bentouis n'est que la partie visible d'une répression plus large contre les militants du Hirak et les voix critiques, y compris ceux de la diaspora qui osent s'exprimer.

Alors que le régime tente de projeter une image de modération à travers ces grâces, la réalité sur le terrain reste marquée par une restriction croissante des libertés fondamentales. La condamnation de Bentouis pour une simple chanson souligne l'hypersensibilité du pouvoir à toute forme de critique, même artistique.

Sophie K.