La Tunisie post-Saïed: L'exode forcé des migrants subsahariens face à une xénophobie institutionnalisée
- cfda47
- 3 nov. 2024
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Une enquête saisissante d'Info Migrants révèle, à travers trois récits poignants, l'inexorable détérioration des conditions de vie des migrants subsahariens en Tunisie. Cette crise humanitaire s'intensifie depuis le discours incendiaire du président Kaïs Saïed en février 2023, marquant un tournant décisif dans le traitement des ressortissants d'Afrique subsaharienne.
La réélection de Saïed en octobre 2024, avec plus de 90% des suffrages dans un contexte de forte abstention, n'a fait qu'exacerber les craintes d'une communauté déjà marginalisée.
Amadou, étudiant en MBA, témoigne de l'impact quotidien de cette hostilité croissante : “À partir de ce moment-là, on a dû changer de vie, et même de comportement. [...] Il faut maintenant être à la maison à une certaine heure sinon ça peut être dangereux d'être dehors quand on est noir”. Une autocensure forcée qui reflète la dégradation profonde du tissu social tunisien.
Violence systémique et violations des droits fondamentaux
Plus alarmant encore, le témoignage de Wilfried, ressortissant camerounais, révèle l'émergence d'une criminalité ciblée : victime d'un kidnapping, il dort désormais dans "une maison en construction" et déclare sans ambages : “Si vous êtes noir, ce n'est plus possible de vivre ici”. Une situation qui pousse de nombreux migrants à envisager un retour périlleux dans leur pays d'origine, malgré les risques encourus.
Le démantèlement progressif des structures d'accueil et d'accompagnement des demandeurs d'asile - notamment la fermeture du Conseil tunisien des réfugiés et le gel temporaire des activités du HCR - a créé un vide juridique aux conséquences désastreuses. Vincent, un autre migrant camerounais, résume la situation avec une phrase glaçante : “Ici, un âne vaut plus qu'un Subsaharien.”
Une justice répressive
La criminalisation systématique du séjour des migrants s'est intensifiée, avec des peines d'emprisonnement de trois mois pour “entrée illégale sur le territoire tunisien”, transformant de facto la Tunisie en un État où la politique migratoire se confond avec une politique répressive.
Cette situation dramatique pousse de nombreux migrants à reconsidérer leur projet migratoire, certains envisageant la périlleuse traversée de la Méditerranée comme une alternative préférable à la précarité et à la violence quotidienne en Tunisie. Une évolution inquiétante qui interroge la communauté internationale sur sa responsabilité face à cette crise humanitaire croissante.
La Tunisie, autrefois considérée comme un pays de transit ou d'opportunités pour les migrants subsahariens, s'est métamorphosée en un territoire hostile où la survie quotidienne est devenue le principal défi d'une communauté stigmatisée et marginalisée.
Sophie K.



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