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Ledmia Embarek: « Le bien-être des femmes n’est pas un luxe, mais une nécessité face aux injonctions sociales »

  • cfda47
  • 7 mars
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 9 mars

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Dans le cadre des événements marquant la Journée internationale des droits des femmes, une conférence sur le bien-être féminin s’est tenue au Centre de Culture Universitaire des Sciences Médicales (CCU), animée par la psychologue clinicienne et formatrice Ledmia Mebarek. À travers une approche sociologique et psychologique, elle a invité à une réflexion profonde sur l’émancipation des femmes et la place centrale du bien-être dans ce processus.



Dès l’introduction, Ledmia Mebarek a tenu à rappeler que le 8 mars ne doit pas être réduit à une simple célébration festive, encore moins à un argument marketing. « Cette journée est avant tout une journée de lutte, de revendications et de mobilisation pour les droits des femmes », a-t-elle martelé, déplorant sa récupération commerciale et la dépolitisation progressive du message féministe.


Selon la psychologue, le bien-être ne saurait être perçu comme un luxe ou une quête individuelle, mais bien comme une nécessité fondamentale et un levier d’émancipation.

« Les femmes sont souvent poussées à sacrifier leur bien-être au nom de responsabilités familiales et professionnelles. Il est temps de revendiquer ce droit, non pas comme un privilège, mais comme un impératif », a-t-elle affirmé.

Mebarek propose ainsi une approche globale du bien-être, englobant non seulement la santé physique et mentale, mais aussi les relations sociales, la stabilité économique et le cadre de vie. « Une femme ne peut pas s’épanouir si elle évolue dans un environnement oppressant », a-t-elle souligné, mettant en avant les impacts des structures patriarcales sur le mal-être féminin.


L’intervenante a insisté sur la nécessité d’une approche systémique du bien-être. « On ne peut pas individualiser la souffrance féminine sans interroger les structures qui l’engendrent », a-t-elle précisé. En prenant l’exemple du burn-out, elle a expliqué qu’un simple travail thérapeutique ne suffit pas si l’environnement professionnel demeure toxique. De même, une femme victime de violences ne pourra se reconstruire sans une autonomie financière et sociale.


Mebarek a également critiqué certaines tendances actuelles qui encouragent les femmes à « gérer leur stress » sans remettre en question les causes profondes du mal-être.

« Dire à une femme de méditer ou de positiver alors qu’elle subit une charge mentale écrasante est non seulement inefficace, mais aussi culpabilisant », a-t-elle dénoncé.

L’un des points centraux de son intervention a été l’impact des stéréotypes et des attentes irréalistes sur les femmes. Elles doivent être performantes au travail, exemplaires dans leur rôle de mère et d’épouse, tout en cultivant leur apparence et leur bien-être mental. « Cette pression constante conduit à l’épuisement », a-t-elle averti, en mettant en lumière les effets néfastes du modèle capitaliste qui valorise la productivité et la perfection, même dans le développement personnel.


Elle a ainsi remis en question l’idéal de « la meilleure version de soi », prônant à la place l’autocompassion, une approche plus bienveillante et moins axée sur la performance.

Mebarek a également évoqué la charge mentale et les inégalités structurelles qui pèsent sur les femmes, citant notamment la répartition inégale des tâches domestiques et la difficulté d’accès à l’emploi malgré un taux élevé de diplômées en Algérie. « Le problème n’est pas la volonté individuelle, mais bien un système qui perpétue ces inégalités », a-t-elle affirmé.


Elle a aussi introduit le concept de « valence différentielle des sexes », développé par l’anthropologue Françoise Héritier, expliquant que les valeurs associées au masculin sont historiquement privilégiées au détriment du féminin. Cela se traduit, par exemple, par un moindre investissement dans la santé des femmes, comme le montrent les maladies cardiovasculaires, souvent sous-diagnostiquées chez elles.


Loin d’une vision antagoniste des rapports hommes-femmes, Mebarek a rappelé que le féminisme est une lutte collective, bénéfique à toute la société. « Défendre les droits des femmes ne signifie pas être contre les hommes, de la même manière que soutenir la cause palestinienne ne concerne pas uniquement les Palestiniens », a-t-elle illustré. Elle a ainsi plaidé pour une redéfinition de la masculinité, détachée des notions de domination et de virilité, et reposant sur la coopération et le respect mutuel.


Un autre volet essentiel de son intervention a concerné le rôle des médias et de l’éducation dans la déconstruction des stéréotypes. « L’égalité des sexes doit être intégrée dès le plus jeune âge, à travers des messages positifs et inclusifs », a-t-elle insisté. Elle a également mis en garde contre certaines justifications biaisées de l’inclusion des femmes, telles que celles basées sur leur prétendue capacité multitâche ou leur endurance, rappelant que l’embauche doit se faire sur des critères de compétence, et non de genre.


En guise de conclusion, Ledmia Mebarek a encouragé les femmes à ne pas chercher à « s’adapter à une société malade », mais à œuvrer collectivement pour une transformation sociétale. Elle a insisté sur la nécessité d’un équilibre entre engagement personnel et action collective, soulignant que

« l’émancipation commence par soi-même, mais ne peut aboutir qu’à travers un changement structurel ».

Cette conférence, riche en réflexions et en échanges, a permis de remettre en perspective le bien-être féminin comme un droit fondamental et une revendication politique. Un message fort, en phase avec l’essence militante du 8 mars.





Nadia. B

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