Maroc: l'ONU pointe les failles dans le dossier des disparus forcés
- cfda47
- 20 nov. 2024
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Le Comité des disparitions forcées de l'ONU vient d'examiner à Genève les avancées du Maroc dans le traitement des disparitions forcées. Son verdict est mitigé : si des progrès sont reconnus, de sérieuses lacunes persistent dans la gestion de cet héritage des “années de plomb” (1956-1999).
Les chiffres témoignent de l'ampleur du phénomène. Selon le Groupe de travail sur les disparitions forcées, 153 cas demeurent non résolus, particulièrement concentrés entre 1976 et 1987. L'Instance Équité et Réconciliation a recensé près de 10 000 cas d'atteintes aux droits humains, dont 592 morts, 322 lors de manifestations, 174 en détention arbitraire, et 66 cas avérés de disparition forcée.
Si la délégation marocaine, menée par le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi, a reçu des éloges pour son “dialogue constructif”, l'examen révèle néanmoins des lacunes significatives dans l'arsenal juridique et institutionnel du Royaume.
“L'absence d'incrimination spécifique des disparitions forcées dans le Code pénal marocain demeure une préoccupation majeure”, soulignent les experts onusiens. Cette carence juridique illustre le décalage entre les engagements internationaux du Maroc et leur mise en œuvre effective.
La géographie de la répression reste gravée dans les mémoires. Les centres de détention secrets - Tazmamart, Agdz, Kelaat M'Gouna, Derb Moulay Chérif - ont abrité des disparitions durant parfois plus de dix-huit ans. Des figures comme Mehdi Ben Barka, Abdelaq Rouissi, Omar al-Wassouli ou Houcine al-Manouzi demeurent des symboles de dossiers non élucidés.
Le règne de Mohammed VI a marqué une rupture. La création de l'Instance Équité et Réconciliation en 2004 et la ratification en 2013 de la Convention internationale contre les disparitions forcées ont initié un processus de réformes. Récemment, le CNDH a lancé des analyses ADN sur le cimetière illégal de Tazmamart, une avancée jugée encore insuffisante par les associations de victimes.
Les recommandations du Comité sont précises : renforcer la compétence extraterritoriale, clarifier les délais de prescription, améliorer le système de réparation des victimes. L'accent est mis sur le droit à la vérité et la nécessité d'un enregistrement rigoureux des détentions.
Un rapport d'étape est attendu pour 2028. D'ici là, le Congrès mondial sur les disparitions forcées de janvier 2025 à Genève constituera une étape clé. Le Maroc devra y démontrer des avancées concrètes, notamment sur la localisation des sépultures, une demande pressante des familles qui attendent toujours des réponses sur le sort de leurs proches.
Sophie K/Agences



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