top of page

Mustapha Bendjama : une amende de 24,5 millions de centimes pour un “procès inéquitable”

  • cfda47
  • 24 juin
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 25 juin

Le journaliste algérien se voit réclamer une amende après le rejet de ses pourvois en cassation dans l'affaire Amira Bouraoui. Une décision que dénoncent les instances internationales, qui qualifient ses procès d'inéquitables et sa détention d'arbitraire.


Mustapha Bendjama doit payer les frais de son propre calvaire judiciaire. Le journaliste algérien, rédacteur en chef du quotidien régional Le Provincial, a révélé que le 12 décembre 2024, deux de ses pourvois en cassation avaient été rejetés dans l'affaire de la sortie d'Amira Bouraoui d'Algérie et celle concernant la divulgation d'informations non confidentielles. Plus choquant encore : le système judiciaire algérien lui réclame désormais 24,5 millions de centimes en “frais” pour un procès que les instances internationales ont dénoncé comme inéquitable.


Le rejet des pourvois a été prononcé pour des raisons de forme, sans que les employés de la Cour suprême examinent les dossiers sur le fond. Une célérité inhabituelle qui contraste avec les délais ordinaires de plusieurs années pour ce type de procédure. “Cette fois-ci, le rejet est arrivé avec une rapidité suspecte et spectaculaire”, souligne Bendjama sur son compte Facebook.


Cette amende symbolise l'absurdité d'un système où la victime doit financer sa propre répression. Car les condamnations de Mustapha Bendjama s'inscrivent dans un schéma de harcèlement judiciaire minutieusement orchestré depuis 2019. Arrêté pour la première fois en février 2023 dans le cadre de l'affaire Amira Bouraoui, cette militante franco-algérienne exfiltrée vers la France via la Tunisie, il avait été soupçonné d'avoir aidé à sa fuite. Une accusation qu'il a toujours niée.


Les instances internationales ont formellement dénoncé ces procédures. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a confirmé que les procès n'avaient pas respecté les conditions minimales d'un procès équitable. Plus grave encore, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a déclaré que l'affaire avait eu lieu “sur fond de représailles et vengeresse, visant à intimider les journalistes et les opposants”. Cette qualification exceptionnelle de la part du plus haut responsable onusien place l'Algérie dans une position d'accusée devant la communauté internationale.


Bendjama, 35 ans, cumule les procédures judiciaires depuis sa participation au mouvement de protestation du Hirak en 2019. Condamné à plusieurs reprises pour des publications Facebook, des accusations de “diffamation”, d' “atteinte à l'intérêt national” ou de “divulgation d'informations classifiées”, il est devenu malgré lui l'un des journalistes les plus poursuivis d’Algérie.


Procédures à répétition depuis 2019

La répression ne se limite pas aux tribunaux. En février 2022, Bendjama a été sauvagement agressé dans les rues d'Annaba, son visage défiguré nécessitant une hospitalisation. Cette agression physique s'ajoute aux convocations répétées, aux arrestations et aux condamnations qui rythment son existence depuis cinq ans.


À chaque fois ce sont plusieurs convocations au poste de police et chez le juge instructeur... après, c'est le procès. Alors j'y vais une fois, puis on reporte, ensuite une seconde fois, une troisième et une quatrième... ça devient épuisant”, témoignait-il en mars 2021 dans un entretien à TSA. Cette tactique d'épuisement psychologique et financier vise à faire taire une voix critique dans une région où peu de journalistes osent encore exercer librement leur métier.


L'ironie atteint son comble avec cette demande d'amende : après avoir été détenu arbitrairement selon l'ONU, après avoir subi des procès inéquitables selon les experts internationaux, Mustapha Bendjama doit maintenant payer pour ces violations de ses droits fondamentaux. Cette facturation de l'injustice transforme le journaliste en débiteur de son propre persécuteur.


Récemment réarrêté le 30 décembre 2024, puis placé sous contrôle judiciaire le 2 janvier 2025, Bendjama fait face à de nouvelles accusations de “délit d'exposition au regard du public de publications de nature à nuire à l'intérêt national”. Le cycle de la répression continue, alimenté par une machine judiciaire qui semble fonctionner en mode automatique contre les voix dissidentes.


Amine B.

Comments

Rated 0 out of 5 stars.
No ratings yet

Add a rating
bottom of page