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Paris /Alger: un dialogue de sourds qui s'enlise

  • cfda47
  • 6 mai
  • 3 min de lecture
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La crise diplomatique entre Paris et Alger s'aggrave. Sans détour, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a dressé mardi un constat sans appel sur RTL : “À ce stade la situation est bloquée et c'est la responsabilité des autorités algériennes”. Une déclaration qui officialise l'impasse dans laquelle se trouvent les relations bilatérales, symbolisée par l'absence prolongée de l'ambassadeur français Stéphane Romatet, toujours retenu à Paris depuis mi-avril.


Le bras de fer engagé entre les deux capitales a franchi un nouveau palier le 15 avril dernier avec la décision d'Emmanuel Macron d'expulser “douze agents servant dans le réseau consulaire et diplomatique algérien en France”. Cette mesure, calibrée à l'identique de celle prise préalablement par Alger, illustre la volonté de l'Élysée de ne plus laisser sans réponse ce que Jean-Noël Barrot qualifie de “décision très violente” de la part des autorités algériennes.


Derrière cette escalade se profile l'épineuse question des ressortissants algériens sous OQTF (obligation de quitter le territoire français), dossier brandi comme un étendard par Bruno Retailleau depuis sa nomination au ministère de l'Intérieur. Un sujet qui cristallise les tensions et sert de révélateur aux profondes divergences d'intérêts stratégiques entre les deux pays.


L'affaire Sansal : entre justice nationale et préoccupations internationales

Le cas de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, actuellement détenu puis hospitalisé en Algérie, constitue un point de crispation supplémentaire. Jean-Noël Barrot a évoqué la situation “très difficile” d’ “un homme de 80 ans qui est éloigné de ses amis”, exprimant l'espoir que les autorités algériennes “sauront faire preuve d'humanité”.


Les autorités algériennes considèrent cette affaire comme relevant strictement de leur système judiciaire souverain. La position constante d'Alger est que les procédures judiciaires suivent leur cours conformément aux lois en vigueur dans le pays, sans que des pressions extérieures ne viennent interférer dans le processus.


La question migratoire au cœur des tensions

La question des ressortissants algériens sous obligation de quitter le territoire français (OQTF), régulièrement mise en avant par le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau, représente un autre sujet de discorde. Pour l'Algérie, cette approche unilatérale ne tient pas compte de la complexité des flux migratoires et des accords bilatéraux existants.


Jean-Noël Barrot lui-même semble reconnaître les risques d'une politisation excessive de ce dossier en déclarant : “Nous avons intérêt (...) à ne pas faire de l'Algérie un sujet de politique intérieure”. Un avertissement qui cible, sans le nommer, son collègue de l'Intérieur et qui révèle les dissensions au sein même du gouvernement français sur la stratégie à adopter. “Lorsque nous le faisons, nous prenons le risque de causer du tort à nos compatriotes franco-algériens”, a poursuivi le chef de la diplomatie française, plaidant pour une approche plus équilibrée, seule à même selon lui de produire des “résultats”.


Vers un nouveau paradigme des relations algéro-françaises ?

Du point de vue algérien, le développement de relations constructives avec la France nécessite une reconnaissance des intérêts stratégiques mutuels et un respect authentique de la souveraineté nationale. L'Algérie, acteur régional influent disposant de ressources énergétiques considérables et d'une position géostratégique clé en Méditerranée et au Sahel, reste ouverte au dialogue mais sur des bases équitables.


Si les cicatrices historiques liées à la période coloniale continuent d'influencer la perception mutuelle des deux pays, les défis communs actuels – sécurité régionale, développement économique, changement climatique, mobilité des personnes – pourraient constituer des leviers pour dépasser les blocages actuels et construire un partenariat renouvelé, comme l'espèrent de nombreux observateurs algériens et français.

 

Sophie K/AFP

 


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