Sofiane Djilali diagnostique « la fin d'une époque » et appelle à une deuxième République
- cfda47
- 10 juil.
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Dans un communiqué publié mercredi, Sofiane Djilali dresse un bilan sans concession de l'Algérie contemporaine. Président de Jil Jadid et figure de l'opposition, il estime que le pays traverse « la phase finale de la vie de sa première République » et qu'il est « désireux et prêt pour une deuxième République ».
Selon Djilali, les fondements du système politique algérien remontent à la guerre d'indépendance, nourris par « une culture nationale qui s'était cristallisée durant les 132 ans de présence coloniale ». Les objectifs initiaux consistaient à « construire un État moderne et souverain, consolider une Nation » et « surmonter les divisions intestines qui avaient miné l'échafaudage politique post-colonial ».
L'auteur retrace l'évolution du pays depuis l'indépendance, identifiant plusieurs phases distinctes. La première période s'est caractérisée par « la sécurité du pays et de l'État, la centralisation politico-administrative de la gestion du territoire et des populations, le contrôle de la rente et l'imposition d'une pensée unique populiste ». Cette approche a fonctionné pendant près de trois décennies, jusqu'à ce que les données démographiques et sociales changent radicalement.
La fin des années 1980 marque un tournant décisif. « L'échec du modèle économique socialiste avait été sanctionné par la baisse brutale de la rente des hydrocarbures due à des turbulences internationales », explique Djilali. Cette crise économique, conjuguée à « la remise en cause des valeurs traditionnelles de la société et un trouble identitaire », a fini par délégitimer le pouvoir en place.
Une tentative d'ouverture avortée
Face à cette situation, les autorités ont tenté « le basculement du pays dans le modèle démocratique, ouvrirent le champ politique et médiatique, et entamèrent une libéralisation économique ». Cependant, cette transition s'est heurtée à la montée du terrorisme islamiste. « La violence islamiste avait pris le pas sur la tentative d'ouverture. Le terrorisme a pris alors une dimension de guerre civile », observe l'auteur.
Cette « phase de désagrégation violente du pouvoir politique » a duré une dizaine d'années, suivie d'une décennie de reconstruction. L'amélioration des prix des hydrocarbures dans les années 2000 a offert au pays « ce répit salvateur dont il avait un besoin vital ». La population, « encore sous le choc des années de terrorisme, voulait, elle aussi, tourner la page de la subversion ».
Djilali identifie les années 2010 comme le moment où « les graves erreurs stratégiques et éthiques du pouvoir » ont réanimé les forces centrifuges. Il accuse le pouvoir politique d'avoir « mis son intérêt égoïste au-dessus de celui de la patrie », provoquant des fractures internes au sein même des institutions de sécurité.
Le Hirak de 2019 représente, selon lui, un moment charnière. « Le peuple algérien intervint. Le Hirak et avec lui, l'ensemble des forces qui l'animèrent, réussirent à éviter le pire, c'est-à-dire la désagrégation de l'État ». Cependant, l'auteur regrette que « les promesses ne furent pas tenues » et que « le système, bien qu'en voie de déliquescence, continua à survivre ».
Le diagnostic actuel que dresse Djilali est particulièrement sévère. Il énumère une longue liste de dysfonctionnements : « délégitimation du système politique », « délitement des institutions politiques », « concentration absolue des pouvoirs », « politique répressive systématique », « fermeture totale de la vie politique et médiatique », et « généralisation de la corruption ».
Sur le plan international, il pointe « l'isolement diplomatique prononcé », « la dégradation des partenariats internationaux » et un « positionnement géostratégique incompréhensible ». Au niveau sociétal, il évoque une « perte de confiance massive des citoyens », une « désertion active de la citoyenneté » et une « démoralisation profonde du pays ».
Face à ce constat, Djilali conclut que « la situation du pays exige maintenant clairement un changement profond, une refonte institutionnelle consensuelle significative et la programmation d'une nouvelle perspective nationale, autrement dit, une deuxième République ». Cette proposition s'inscrit dans la continuité de ses positions politiques, l'ancien dirigeant du parti Jil Jadid ayant toujours prôné une transformation radicale du système politique algérien.
Sophie K.
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